Photo DR : allocine.fr
Film belge de Jaco van Dormael (sorti le 2 septembre 2015)
Avec Benoît Poelvoorde, Yolande Moreau, Pili Groyne
Le dernier-né du belge Jaco van Dormael est un remarquable opus qui va surprendre, peut-être choquer quelques grenouilles de bénitier, faire réfléchir, assurément, rire évidemment, mais surtout vous emmener aux frontières de vos conceptions de Dieu.
Attention, bande-annonce trompeuse !
Quand on regardait, cet été, les extraits proposés dans les salles de cinéma au sujet du « Tout nouveau Testament », on se disait qu’on allait bien rigoler. Film léger, humour lourd. Avec les belges de « Rien à déclarer » en plus (Benoît Poelvoorde, François Damiens,…) le ton était forcément donné. Erreur… C’était oublier le nom du réalisateur – également scénariste – Jaco van Dormael (« Le huitième jour », pour ne citer déjà que cette oeuvre qui nous avait fait le même coup de bluff entre bande-annonce légère et film-chef-d’oeuvre).
Voici donc un film inclassable qui hésite entre science-fiction, drame et comédie. On rit, oui. On pleure, aussi. On se prend en pleine figure nos clichés sur un Dieu sadique et vengeur tellement prêché dans les siècles précédents, et on se surprend à redécouvrir un Dieu qui met de la bonté sur la terre. mais pas le Dieu que vous croyez… l’autre… sa fille !
La fille de Dieu
Car un personnage mérite à coup sûr nos éloges, non seulement pour son invention dans le scénario mais aussi pour son interprétation (elle a d’ailleurs la place d’honneur au générique du début, avant Benoît Poelvoorde). Elle s’appelle Ea, elle est la fille de Dieu, et elle est délicieusement campée par la jeune Pili Groyne, absolument jubilatoire. Si Jésus est présent (« JC », comme le dit Ea) dans deux-trois passages où l’on rit bien, la fille de Dieu, elle, est le fil rouge de toute cette histoire. Car c’est elle qui va nous faire passer de l’ancien au nouveau puis au tout nouveau testament, de nos clichés de jadis au Dieu tel qu’il est – je le crois – réellement, un Dieu d’amour.
Un bonheur pour les yeux
Techniquement parlant – Jaco van Dormael nous y a habitués – ce film est un bonheur pour les yeux. On peut louer spécialement le travail du directeur de la photo : quatre fois nommé aux Césars (notamment pour « Coco avant Channel » et pour « La belle et la bête » cette année), Christophe Beaucarne signe là un véritable petit chef d’oeuvre. Chaque image est pensée, éclairée à sa parfaite justesse, chaque visage est une invitation à lire ce que la personne porte en elle, chaque lieu – qu’il soit laid ou beau – sert parfaitement l’histoire.
18 apôtres
Sans révéler ici l’histoire, les six apôtres supplémentaires que devra trouver Ea dans notre monde apportent chacun quelque chose à une nouvelle vision de Dieu. Les thèmes authentiquement chrétiens se révèlent en eux, passant de leur extrême inverse à leur véritable expression : la beauté (à travers Aurélie – Laura Verlinden – et selon les standards ou selon le coeur), l’amour (l’étonnant « obsédé » Marc – Serge Larivière – de son contraire absolu dans les salons X jusqu’au véritable amour, forcément inattendu et transcendant), la charité (François – François Damiens – époustouflant de justesse, d’un fusil qui ne tire jamais jusqu’à un bouquet de marguerites qui crève l’écran), le bonheur (Martine – incroyable Catherine Deneuve – passant du bonheur standardisé tout confort au bonheur impensable d’un (vrai) gorille…
Le vrai Dieu
Ea circule de l’un à l’autre en nous brossant peu à peu le portrait du vrai Dieu, pas celui de son imbécile et sadique de père (saluons la performance de Benoît Poelvoorde, insupportable à souhait, et qui provoque forcément l’éclat de rire de toute la salle dans la toute dernière séquence) mais celui du Dieu d’aujourd’hui, le Dieu du pape François, celui d’une église qui s’ouvre au monde et à une meilleure compréhension de « l’ordinateur central » qui gère (ou non) nos vies. Et si ce vrai Dieu était une femme ?
A voir absolument sur grand écran, dans un bon cinéma près de chez vous.
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