Le verre à moitié plein

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Homélie pour le 3e dimanche de l’Avent A

Thème interparoissial : « LES VISAGES S’ILLUMINERONT »

Isaïe 35, 1-6a.10 / Psaume 145 / Jacques 5, 7-10 / Matthieu 11, 2-11

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Chers Amis,

Vous le savez je crois, je le crains… je suis né à Genève. Je dis « je le crains » parce que ça peut être un défaut redoutable, dans certains esprits du moins ! J’ai vécu près de 30 années de ma vie dans la cité du bout du Lac… Du bout du Lac Léman, bien sûr !

Les Genevois ont la réputation d’avoir reçu de leurs voisins français d’être un peu râleurs sur les bords… et les bords sont larges.

Et comme je suis aussi français d’origine… c’est vous dire que j’ai dû recevoir une double dose, personnellement !

Mais heureusement, à ce qu’on me dit, mes années passées à Fribourg, en Valais et maintenant dans ce beau canton de Vaud font que ça s’est un peu atténué quand même.

Même si ça revient de temps en temps, j’avoue.

Mais je vois à vos sourires compatissants que je ne suis peut-être pas le seul à ronchonner de temps en temps. On n’a pas toujours le visage qui s’illumine, il faut bien le reconnaître.

Or c’est le thème de notre 3^e dimanche de l’Avent. Les visages s’illumineront ! Or, quand on est ronchon, on n’a pas tellement le visage qui s’illumine, en général.

Et ça nous arrive, il faut le reconnaître !

La neige arrive-t-elle jusqu’en plaine, comme ces jours ? On râle parce que les routes sont glissantes et qu’on n’a pas tous pensé à un équipement d’hiver.

Mais, au contraire, fait-il grand beau au mois de décembre ? On râle parce qu’il n’y aura pas assez de neige sur les pistes en hiver…

Il fait toujours trop froid ou trop chaud, trop humide ou trop sec… il y a toujours un « trop »… vous êtes d’accord ? Il y a toujours un « trop » qui nous empêche de nous satisfaire de ce que nous avons au moment où nous le vivons.

Alors que franchement, chers Amis… vous n’êtes pas heureux, vous ? Mais si, je le vois à vos visages qui s’illuminent lorsque vous souriez.

Et on peut voir le verre à moitié plein, Dieu merci ! Il pleut ? La terre en avait bien besoin ! Il neige ? Formidable, on va pouvoir skier ! Il fait beau ? Mais quel bonheur de sentir le soleil nous réchauffer ! Sachons illuminer nos visages de toutes ces petites choses, Chers Amis !

Quelle chance nous avons ! Nous faisons partie des 5% de personnes les plus riches au MONDE. Vous le savez, ça ?

Pas riches en argent… non non non… il n’y a pas que de l’argent pour être riche !

Et puis, ça, c’est à l’étranger qu’on est persuadé que tous les Suisses ont un coffre rempli à la banque ! Nous, on sait bien que ça n’est pas le cas !

Non, on peut être riche de beaucoup d’autres choses, et nous sommes richissimes. Richissimes ! Nous faisons partie des 5% de gens des personnes les plus riches du monde.

Si vous ne me croyez pas, jugez plutôt avec ce célèbre petit texte que je vous ferai distribuer tout à l’heure et qui peut très bien trouver une place méditative le 24 au soir ou le 25 lors de vos fêtes familiales.

Ce petit texte qui dit ceci :

« Si votre état de santé était plutôt bon dans l’ensemble ce matin…

…vous avez déjà plus de chance qu’un million de personnes qui ne survivront pas la semaine prochaine sur notre planète…

Si vous n’avez jamais connu le danger d’un conflit armé, la solitude de l’emprisonnement, la douleur de la torture, ou les tiraillements de la faim…

…vous surclassez 500 millions de personnes dans le monde qui ont moins de chance que vous…

Si vous savez lire…

…vous avez plus de chance que le milliard de personnes qui, aujourd’hui encore, en sont incapables parce qu’elles n’ont pas eu la chance qu’on le leur apprenne…

Si vous pouvez assister à toutes les réunions de votre choix – politiques, religieuses, sociales –… si vous avez pu venir librement ce soir à cette messe…

…vous avez plus de chance que trois milliards de personnes à travers le monde. Notamment ceux qui, ce soir, viennent à la messe avec la peur au ventre…

Si vous avez à la fois de quoi manger dans votre frigo – et donc un frigo ! – des vêtements sur le dos ce soir, un toit au-dessus de la tête tout à l’heure et un endroit où dormir …

…vous êtes plus riches que 75 % des habitants de notre planète…

Et si, en plus de tout cela, vous avez quelques sous dans votre portemonnaie, dans une tirelire, sans même parler d’un compte en banque…

…alors vous faites, nous faisons partie des 5 % les plus riches du monde ! »

Pour une fois, chers Amis, n’en ayons pas honte ! Parce qu’on pourrait très bien lire ce texte et en faire quelque chose de terriblement jugeant. Non ! Pour une fois, n’en ayons pas honte. Soyons joyeux de cette richesse, de toute la chance que nous avons.

Vous savez, j’ai rencontré Sœur Emmanuelle, jadis. Vous vous souvenez certainement de cette religieuse qui, entre autres, a passé la fin de sa vie au service des plus pauvres.

Et, après l’interview qu’elle m’avait accordé, une fois le micro coupé, je lui ai dit : « Ma Sœur, c’est merveilleux tout ce que vous nous avez dit là, mais qu’est-ce que moi je peux faire moi pour vous, à ma petite échelle ? Qu’est-ce que moi je peux faire pour les gens que vous aidez ? »

Elle m’a regardé, son œil piquant, comme ça, elle m’a pointé du doigt et elle m’a dit : « Mon petit Vincent !… » (elle tutoyait toujours tout le monde !) Elle m’a dit : « Mon petit Vincent, ce que tu dois faire pour les aider là-bas c’est être heureux ICI ! »

Et elle me l’a dit avec cette vigueur-là… « Ce que tu dois faire pour les aider là-bas c’est être heureux ICI ! »

Devant mon air ahuri elle a continué en me disant : « Tu le leur dois, à tous ces gens ! Tu le leur dois d’être heureux ici ! Parce que tu as de la chance, toi ! Et ils seraient très fâchés s’ils savaient que tu n’es pas heureux avec la chance que tu as, avec tout ce qu’ils n’ont pas. Alors ce que tu leur dois c’est d’être heureux ici ! »

Et son visage s’est illuminé… j’ai vu passer dans ses yeux tous les gens à qui je devais effectivement d’être heureux, d’être joyeux.

Et je n’ai jamais oublié cette phrase de Sœur Emmanuelle…

Pour une fois, chers Amis, ne culpabilisons pas du bonheur que nous avons, au contraire ! Soyons joyeux de cette chance que nous avons, de vivre comme nous vivons, là où nous vivons, avec qui nous vivons. Redisons-le autour de nous, notamment pendant ces fêtes !

Annonçons de belles choses, comme le suggérait l’Evangile. Annonçons-les déjà en illuminant nos visages autant que nous illuminons nos maisons et nos sapins en cette période de l’Avent.

C’est ça, être dans la joie, c’est d’abord avoir conscience de ce que l’on a et de la chance que l’on a. Et ne pas commencer à râler pour tout et pour rien comme nous savons parfois si bien le faire…

Paul nous le disait dans la deuxième lecture : « Ne gémissez pas les uns contre les autres, mes Frères ! » Surtout nous ! On n’a pas tellement de raisons de le faire, finalement…

Essayons d’y penser un peu… vous verrez… on partage tellement plus facilement la joie, ensuite, quand on a conscience de celle qui nous habite.

Ne serait-ce qu’un sourire ! Un sourire qui ne coûte rien à partager mais qui enrichit doublement celui qui le partage et celui qui le reçoit, vous le savez bien !

En ce troisième week-end de l’Avent qui est le week-end de la joie, réjouissons-nous !

Comme la première lecture nous le suggérait aussi, ce prophète Isaïe qui est l’un des prophètes de la joie, qui nous demande d’être joyeux pour préparer la venue du Seigneur ! « Même le désert, le pays de la soif, qu’il se réjouisse ! » disait Isaïe.

Alors oui chers Amis, c’est à la joie que je nous invite ce soir ! Joyeux de tout ce que nous avons, et il y a de quoi !

On a tellement de chance, vous et moi. Prenons-en conscience, humblement. Et sachons remercier pour tout ce que nous avons ! Sachons illuminer nos visages pour que les visages que nous croiserons s’illuminent à leur tour.

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Bex, samedi 14 décembre 2019, 18.00

Euseigne, dimanche 15 décembre 2019, 18.30

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> Feuillet 5% les plus riches du monde

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