L’Evangile des teinturiers

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Homélie pour le 7e dimanche de Pâques, C

Actes 7, 55-60 / Psaume 96 / Apocalypse 22,12-20 / Jean 17,20-26

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Eh bien, Chers Amis,

Nous venons d’entendre le célèbre Evangile des teinturiers. Si, si, « Que tous soient’un … Que tous soient teints », ça va, vous y êtes ?

Mais au-delà de la blague, il y a certainement une vérité que nous allons voir ensemble. D’ailleurs il y a très souvent des vérités cachées dans l’humour… L’humour est très important, y compris en Eglise…

Une fois, quelqu’un m’a dit : « Faut pas rire à la messe ! » Ah bon ? Jésus était un homme joyeux, chers Amis, un homme qui savait faire la fête, qui dansait, qui chantait ! D’où vient qu’à la messe, on a un sérieux sépulcral ? Il s’agit de joie ! Et, dans l’humour, il y a des vérités cachées.

Ainsi, c’est l’Evangile des teinturiers. Il n’y a plus ni blancs, ni noirs, ni rouges, ni jaunes… ça veut dire quoi ? Il y a une nouvelle couleur ? Genre plus blanc que blanc, comme le disait Coluche à l’époque ? Ou plus noir que noir, si vous préférez, je ne veux pas me faire taxer de racisme, surtout pas…

Non, ce n’est pas ça. C’est pas une nouvelle couleur qu’il nous faut rechercher, c’est pas une nouvelle couleur que nous cherchons en venant à la messe. C’est bien le mélange des couleurs, comme le chantait une vieille chanson pas si bête, d’ailleurs.

Et c’est du mélange de toutes nos couleurs que naît non pas le blanc mais la lumière.

Que tous soient un… que toutes les couleurs n’en fassent plus qu’une… que tous se revêtent de lumière, que tous soient teints de lumière… vous voyez que, derrière la blague, il y a quelque chose d’assez juste, finalement.

Nous avons à redevenir lumière. Quoi de plus lumineux qu’un sourire ?

C’est pour cela, notamment, qu’un Chrétien triste… y a un léger bug ! Si en sortant de cette messe, et en partageant l’apéro, nous faisons la tête, il y aurait un léger problème. Le Chrétien, à la base, transmet de la joie. Et le Chrétien essaie d’être un transmetteur d’unité – que tous soient UN.

Seulement attention ! Unité ne veut pas dire uniformité. Et on a tendance à confondre les deux.

Ce serait bien dommage que tous les instruments d’un orchestre, par exemple, même un petit orchestre comme ce soir, que tous les instruments jouent exactement la même chose… Il y aurait uniformité, mais quelle tristesse ! Il n’y aurait pas d’unité, de symphonie, de jeu ensemble…

Si tous les musiciens d’un orchestre jouent des partitions différentes qui sont elles-mêmes accordées entre elles, c’est justement pour faire unité et non uniformité.

Au nom de l’uniformité, on a fait des horreurs.

L’uniforme qui gommait les différences, c’était une très bonne idée. Mais l’uniforme qui entraîne les autres à la bataille et qui gomme la réflexion, qui anesthésie le cerveau des hommes jusqu’à leur faire croire que tuer leur prochain est un bienfait… non ! On n’est plus du tout dans l’Evangile de ce jour.

Or l’uniformité vient très vite, vous le savez ! Quand on appartient à un groupe uniforme, on peut faire de graves erreurs, si on se laisse influencer par le groupe dans ce cas-là.

C’est exactement ce qui nous était relaté dans la première de nos lectures, avec la lapidation du premier martyr, Etienne. Même un certain « Shaoul » est là. On l’appelle aussi « Saul » des fois, en français, ça fait un peu « saule pleureur »… on l’appelle aussi « Saül », comme l’a dit Olivia. Même lui est là à jeter des pierres, à exciter la foule. Plus tard il changera de nom, il s’appellera Paul, et lui aussi unifiera les Chrétiens à la suite de Jésus.

Unis mais pas uniformes. Parce que c’est aussi à l’aune de ce que nous aurons fait ici-bas que nous serons évalués là-haut.

Ça c’est la seconde lecture qui nous le disait, par la voix de Stéphane, le livre de l’Apocalypse : « Voici que je viens sans tarder, et j’apporte avec moi le salaire que je vais donner à chacun selon ce qu’il aura fait. »

Au jour du jugement, pourrons-nous nous présenter avec fierté devant celui qui nous donnera notre salaire ? Allons-nous dire à notre Sauveur, pour nous justifier de toutes nos lapidations : « Mais Seigneur, j’ai fait comme tout le monde ! Tout le monde condamnait cette personne, alors moi aussi ! J’savais pas, moi ! »

Ou alors le célèbre : « Seigneur, je n’ai fait qu’obéir aux ordres, moi.»

C’est ce que disaient les nazis après guerre, notamment au procès de Nüremberg : « Mais Monsieur le Juge, tout le monde haïssait les Juifs, je n’ai fait que faire comme tout le monde. Mais Monsieur le Juge, on m’avait ordonné de les tuer, je n’ai fait que suivre les ordres. »

Vous vous dites que tout cela est très loin? Ce n’est pas si loin que ça. C’est même très proche, dans nos cœurs, dans nos esprits…

« Bah… tout le monde rejette cette personne du village, alors je vois pas pourquoi je ferais différemment. Tout le monde a voté ‘oui’, je vois pas pourquoi je serais contre… » On entend parfois ça au lendemain de votations : l’avis de la majorité, on voit pas pourquoi on serait contre !

L’uniforme n’a pas toujours raison…

En arrivant devant le Seigneur, je souhaite que nous, Chrétiens, au contraire, nous puissions dire avec fierté : « Seigneur, tu as unifié mon coeur. Je me suis écarté de la foule, j’ai prié pour que tous soient véritablement UN. J’ai vu les autres lancer des pierres, je ne l’ai pas fait, mais s’il te plaît, pardonne-leur, ne leur compte pas ce péché. »

Unité. Et pardon, comme Etienne dans la première lecture, sous les cailloux lancés par ses frères contre lui.

Alors cette semaine, chers Amis, si nous devions tirer une piste des textes qui nous sont proposés, je vous invite à rechercher l’unité entre vous, et non pas l’uniformité.

Vous n’avez qu’à vous regarder : il n’y a pas deux personnes semblables dans cette assemblée. Nous ne sommes pas uniformes, et pourtant nous essayons d’être UN en chantant les mêmes chants, grâce à Laurent, nous essayons d’être UN dans le silence, dans la prière… nous essayons de ne faire qu’UN.

Recherchons cela cette semaine, recherchons l’unité dans notre travail, l’unité dans nos familles, l’unité dans notre cœur, l’unité dans notre façon de prier, de penser, d’aborder les gens.

Parce que l’Ange Noir… vous savez quel est son surnom ? « Diabolos », en grec, ça veut dire « le Diviseur ». C’est justement celui qui est contre l’unité, celui qui cherche à diviser, c’est son identité-même !

Et l’Ange Noir nous attend toujours à ce contour-là.

Si on l’appelle le Diviseur, c’est pas pour rien. Diviser ce n’est pas du tout attaquer l’uniformité – au contraire, il adore ça, il s’en sert de l’uniformité. Diviser c’est attaquer l’unité, qu’il ne supporte pas. Et c’est ce qu’il fait jusqu’au fond de nos cœurs.

Chassons de notre esprit, chers Amis, ce qui peut être source de division, dans notre communauté, dans nos familles, au sein de nos couples, en nous-mêmes, entre nos Eglises aussi.

Et si par hasard nous sentions monter en nous de mauvaises voix – il y en a aussi – des voix qui nous diraient : « Mais Seigneur, tu te rends compte de ce qu’il a fait / de ce qu’elle a fait ? Moi je ne peux pas lui pardonner ! »…

…Des voix qui nous diraient : « Mais il m’a menti. Pourquoi est-ce que j’irai lui pardonner ? »…

…Des voix qui nous diraient : « Mais cette personne salit ton Eglise, pourquoi est-ce qu’on lui pardonnerait ? »

souvenons-nous d’Etienne, sous les cailloux, et prions ainsi : « Seigneur, ne lui compte pas ce péché, à cette personne qui m’énerve. Aide-moi à voir clair en mon cœur, unifie mon cœur, Seigneur, pour que je sois UN, moi aussi, comme le Père et le Fils sont UN. »

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Nyon, dimanche 8 mai 2016, 19.00 (Messe « Dimanche 19h », version enregistrée)

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