Prendre sa croix et brûler du feu de l’Esprit

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Photo DR : 123RF.com

 

Homélie pour le 22e dimanche TO, année A

 

Isaïe 66,18-21 / Psaume 116(117) / Hébreux 12,5-7.11-13 / Luc 13, 22-30

 

– Fête des 100 ans de l’incendie d’Euseigne, en présence de notre évêque –

 

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

Imaginons quelques instants que Jésus revienne aujourd’hui. Aujourd’hui, en chair et en os, à Euseigne, ce matin. Il vient fêter, célébrer avec nous les cent ans de l’incendie du village, il s’est parqué à côté de Jean-Marie, dans les places VIP, là-bas, et il débarque pendant la messe !

 

Extraordinaire ! Vous imaginez deux secondes ?

 

Tout le monde l’accueille, bien sûr ! Tous les Chrétiens sont en liesse, on reconnaît le Messie, merveilleux !

 

Et le voilà qui nous dit : vous êtes heureux de me voir ? Moi aussi ! Mais vous savez, il va falloir que je passe par des moments difficiles ces prochains jours : une campagne de dénigrement de la part des journaux, que je me fasse ridiculiser dans une émission de télévision, que je sois condamné par les tribunaux, sous vos yeux, et par-dessus tout que je meure égorgé par une poignée d’extrémistes. Dans quelques jours.

 

Que dirions-nous, chers Amis ?

–      Mais non ! Mais non, Seigneur ! On est là ! Ça ne t’arrivera pas ! C’est impossible !

 

Et c’est exactement la réponse de Pierre, dans l’Evangile que nous venons de réentendre.

–      Mais non, Seigneur ! Ça ne t’arrivera pas ! Ce n’est pas possible !

 

Car pour les Juifs de l’époque, pour Pierre, pour Jacques, pour Jean, pour tous les disciples, le Messie, Dieu, c’est un être forcément Tout-Puissant.

 

Jésus sait très bien cela. Il sait qu’ils attendent un Messie tout-puissant. Un Superman, en quelque sorte. Et il va devoir leur faire avaler la pilule de sa déchéance, du fait qu’il sera rabaissé par tous, qu’il devra souffrir, et qu’il va mourir sur une croix.

–      Mais non, Seigneur ! Ça ne t’arrivera pas !

 

C’est impossible à entendre pour Pierre, tout comme pour les disciples. C’est tout simplement scandaleux. Le Messie ne PEUT PAS avoir cela à vivre, c’est impensable.

 

Nous, deux-mille ans plus tard, on y pense avec un petit sourire attendri pour Pierre. On se dit peut-être que s’il avait su, le pauvre, il aurait réagi autrement… sûrement ! Et que nous, maintenant, nous réagirions autrement, sûrement !

 

…Ah oui ?

 

Les journaux, la télévision, les tribunaux, la mort…

–      Mais non Seigneur ! Ça ne t’arrivera pas ! C’est impossible !

 

Et s’il y a 101 ans Jésus avait dit au curé Gaspoz: « Tu sais, mon brave Antoine, mon curé, mon serviteur, tu es berger d’un magnifique village. Mais ce village va brûler, mon église avec, tout sera anéanti en quelques heures tu verras. »… qu’aurait répondu le curé Gaspoz ?

–      Mais non Seigneur ! On est là ! C’est impossible !

 

Vous voyez chers Amis, Pierre, comme très souvent dans l’Evangile, nous tend un miroir. Un miroir de notre humanité.

 

Dans notre humanité avec tout ce qu’elle a de magnifique et tout ce qu’elle a de faible, nous espérons toujours le meilleur – et c’est bien ainsi ! Mais nous oublions parfois qu’il y a des croix sur le chemin du meilleur, qu’elles font partie du chemin, qu’il nous faut les porter comme Lui a porté sa croix, comme Lui nous a tous portés sur sa croix.

 

Et que répondrait Jésus au curé Gaspoz, ou à nous ce matin ? Que répond-il à Pierre qui lui dit « Mais non, ça n’arrivera pas ! » ?

 

Il répond cette phrase terrible que nous avons entendue dans l’Evangile : « Passe derrière moi, Satan ! Tu es pour moi une occasion de chute, tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des Hommes. »

 

Il me semble, Chers Amis, que non, sur ce point nous n’avons peut-être pas tant évolué que ça, en deux-mille ans. Nous ne sommes pas très différents de Pierre. Tout simplement parce que nous sommes humains, comme il l’était.

 

Nous sommes toujours à l’âge de Pierre, en quelque sorte. L’âge de cette pierre sur laquelle le Christ poursuit inlassablement la construction de son Eglise, cent pour cent sainte et à cent pour cent composée de pécheurs. Eh oui, tous, nous tous ! Diacres, prêtres, évêques, pape compris, nous sommes aussi pécheurs que vous, davantage que certains d’entre vous. Benoît XVI le rappelait régulièrement, François le fait aussi, souvent.

 

Nous n’avons pas changé depuis l’âge de Pierre, l’âge de Simon-Pierre. Et nous sommes nous aussi, nous tous, ces pierres sur lesquelles le Christ bâtit son Royaume, malgré nos aspérités, nos rugosités, nos fragilités, nos fissures, nos doutes…

 

Vous croyez que la vie d’un Chrétien est simple ? Que c’est un chemin de roses sur lequel aucun obstacle ne saurait nous faire trébucher puisque Dieu est avec nous ? C’est Satan qui nous inspire une telle pensée, lorsqu’elle vient en nous, et c’est le Christ qui nous le rappelle dans l’Evangile d’aujourd’hui.

 

Celui qui veut suivre le Christ, qu’il prenne d’abord cette croix que nous avons chacune, chacun, à notre manière, dans notre vie.

 

Toi l’ouvrier, prend ton travail pénible de tous les jours pour suivre le Christ, avant de rêver à ta retraite où tu pourras couler des jours heureux !

 

Toi le cadre supérieur, prend les incessantes responsabilités de ta fonction, les crachats de celles et ceux qui t’envient, prend tout cela avant de rêver de passer ta retraite dans ton beau chalet à la montagne. A Euseigne par exemple.

 

Toi la mère de famille, prend tes nuits écourtées à trois heures du matin par la petite dernière qui se réveille et qui a faim, avant de rêver à tes futurs petits-enfants…

 

Toi, le politicien, prend les insultes, les coups-bas, les mauvais articles dans les journaux, avant de rêver à ta prochaine élection.

 

Toi, l’étudiant, prend les plus difficiles de tes examens avant de rêver à ton diplôme.

 

Toi le cantonnier, prend la poussière de toutes les routes avant de rêver aux sentiers du paradis…

 

Toi le paroissien, fidèle de la messe du week-end, prends les pauvres prêtres qui te sont envoyés plutôt que de regretter les précédents ou de rêver aux suivants, forcément meilleurs.

 

Toi, la personne handicapée, prends ton handicap avant de rêver au corps glorieux que nous aurons tous à la Résurrection.

 

Toi le veuf, toi la veuve, prends ton chagrin avant de rêver aux retrouvailles célestes.

 

Et toi, cher Simon-Pierre… Accepte que ton Messie soit crucifié devant toi, qu’il va te falloir même aller jusqu’à le renier, tu verras. C’est cela, ta croix à toi. Et toi aussi tu l’as assumée.

 

Prends ta CROIX, mon ami, qui que tu sois. Profite des beautés de la vie, mais sache que les difficultés que tu rencontres sont des croix, et qu’il faut les porter pour suivre Jésus.

 

C’est Paul, dans la seconde lecture, qui nous y invitait aussi. Que chacun de nous s’offre, offre ses croix, les passages difficiles du chemin, les insultes, les moqueries comme disait Jérémie le prophète, dans la première lecture.

 

Parce que de toutes façons, comme il le disait aussi, le seul feu dont nous brûlons réellement, c’est le feu de la parole, la parole que le Seigneur nous a confiée et qu’il nous faut annoncer puisque nous sommes prophètes, tous, par notre baptême.

 

Alors que nous commémorons cette croix douloureuse que fut le feu d’Euseigne il y a cent ans, que le feu de la Parole de Dieu, le feu de son Esprit, continue de brûler en nos cœurs ! Et que ce feu-ci ne s’éteigne jamais !

 

Amen.

 

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Euseigne, dimanche 3 septembre 2017, 10.17

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