Prier en commençant par « bonjour »…

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Photo DR : s-c-f.org

Homélie pour le 17e dimanche du temps ordinaire

Gn 18,20-32 / Ps 137(138) / Col 2,12-14 / Luc 11,1-13

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Chers Amis,

J’aimerais que vous imaginiez dans votre esprit une petite fille, disons 4 ou 5 ans… vous l’avez ? Elle est devant une vitrine, avec des jouets. Et elle demande à sa maman, qui est à côté d’elle, de lui offrir ce beau jouet, là, dans la vitrine. Une petite fille ou un petit garçon, pas de souci. Je prends l’exemple que j’ai moi-même en tête.

« Maman, s’il te plaît…« 

Et la maman de répondre : « Non, tu as déjà bien assez de jouets comme ça…« 

« Alleeeeeez, s’il te plaît… si je suis très sage…« 

« Je t’ai dit non.« 

« Maaaaais, s’il te plaît, Maman, si je suis très sage ET que je range ma chambre…« 

« Je t’ai dit non, et si tu insistes ça va mal finir…« 

« Alleeeeez, si je suis très sage, que je range ma chambre ET que je ne te demande plus jamais un autre jouet…« 

« Je t’ai dit NON !« 

Vous avez la scène ? Je vois à certains sourires que c’est du vécu…

Dans la première lecture, entre Abraham et Dieu son père, c’est exactement la même scène, en fait, mais inversée. Abraham insiste, il demande sans arrêt quelque chose de mieux – comme si la petite fille demandait d’abord un jouet, puis deux, puis trois, puis quatre,puis toute la vitrine – mais la réaction est inversée parce que Dieu son Père lui dit : « Je t’ai dit OUI ! N’insiste pas, je t’ai dit OUI !« 

Abraham, c’est un peu le syndrome du commerçant de vos vacances. Celui qui dit :

« Tiens, prends encore le tapis, c’est cadeau ! Tu prends la cafetière avec, ça me fait plaisir !« 

« Merci, mais…« 

« Eh puis, prends le narguilé, aussi, ça me fait plaisir ! Je te fais moitié prix…« 

Vous le connaissez aussi, celui-là…

Dans son marchandage avec Dieu, parce que c’est un marchandage, Abraham insiste :

Mais Seigneur, si tu trouves 50 justes, tu vas pas détruire Sodome ? Et si tu en trouves 45 ? Et si tu en trouves 40 ? Et si tu en trouves seulement 30 ? Et s’il n’y en a que 20 ? Et s’il y en a seulement 10 ?

On a envie de lui dire : ça va, arrête, je l’achèterai pas, ton narguilé, Abraham, ton tapis non plus d’ailleurs, de toutes façons tu vas m’arnaquer !

Mais Dieu ne fonctionne pas comme cela. Il dit « oui » à chaque question.

Pourtant, me direz-vous, on connaît la suite de l’histoire… Même si notre lecture de ce week-end s’arrêtait juste là. Ensuite, si vos souvenirs sont bons, et ils le sont : Dieu va détruire Sodome !

Oui, parce qu’il n’y avait trouvé que deux justes, Lot et son épouse. Et puis quelques autres, c’est vrai, mais qui ont cru à une blague, qui n’ont pas écouté la voix de Dieu. Il fera sortir les justes de la ville pour les protéger en leur demandant de ne pas se retourner… Et on connaît la suite, l’épouse, hélas, se retournera et sera changée en statue de sel. Lot, lui aura la vie sauve, mais Sodome sera détruite. Voilà pour la suite de l’histoire.

Mais dans notre extrait de ce soir, Abraham marchande avec un Dieu qui offre TOUT… tout ce que nous demandons et même plus, puisqu’Abraham dans sa dernière question avait parlé de dix personnes – si tu en trouves encore seulement dix ! – …même pour DEUX, on les sauvera.

Simplement, bien souvent, contrairement à Abraham, nous n’osons pas demander. Peut-être parce qu’on se souvient de la voix de notre père ou de notre mère quand on était petit enfant, devant la vitrine, de la voix qui disait « si tu continues, ça va mal finir !« 

Alors on prie en balbutiant, en s’excusant de demander, en disant : « Seigneur, je sais bien que tu as beaucoup de choses à faire, je voudrais pas te déranger, mais si par hasard, à la rigueur, peut-être, éventuellement, j’osais te demander une petite chose…« 

Et pourtant le Seigneur veut TOUT nous donner, tout, l’entier de la vitrine, tout le magasin de tapis et le narguilé qui va avec ! Il nous a déjà tout pardonné, y compris de le déranger dans notre prière pour une petite chose. C’est Paul qui le disait dans la deuxième lecture. Il ne nous veut que du bien, il nous a tout pardonné. Sodome est loin derrière nous, c’est du passé. Mais il attend qu’on le prie, vraiment.

Et c’est peut-être là que se trouve la clé des textes de ce week-end.

Parce que, dans l’Evangile, vous l’avez entendu, Jésus nous enseigne justement à prier.

Vous allez me dire : « Si on est venus ici c’est qu’on sait prier ! On n’a peut-être pas besoin d’une leçon pour savoir prier… » Ben peut-être que SI, vous allez voir…

Jésus nous enseigne à prier avec ce fameux Notre Père… Et là aussi vous allez me dire : « Le Notre Père, on connaît, ça va !« …

…On le connaît tellement bien qu’on le récite parfois sans y penser, vous savez… comme une petite poésie, une petite mélodie, comme ça, apprise par coeur…

Mais il est très intéressant ce texte du Notre Père, destiné à nous apprendre la prière.

Est-ce que ça commence par une demande pour nous, dites-moi ? …Non.

Est-ce que le Notre Père commence par « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour » ? Non.

Est-ce que le Notre Père commence par  « pardonne-nous nos offenses » ? Non.

Le Notre Père ne commence pas par une demande pour nous.

Le Notre Père commence par une confession de foi – Père – et une louange – que ton nom soit sanctifié.

Si nous commencions nos prières, chers Amis, par un acte de foi et de louange, par un MERCI à Dieu, avant même de lui demander quoi que ce soit, vous croyez pas que ce serait une bonne idée ? C’est la technique de Jésus, hein, moi ce que j’en dis… Mais enfin, s’il nous l’a enseignée, cette technique, c’est peut-être parce que c’est la bonne, vous croyez pas ?

Alors comme il est toujours bon d’aller piocher dans la théologie des enfants, qui comprennent bien mieux Dieu que nous, pour terminer je vous raconte l’histoire tout à fait authentique de la petite Florence, 4 ans et demi, en garde chez ses grands-parents. Une petite qui a compris exactement l’enseignement de ce soir sur la prière.

La petite Florence est en garde chez ses grands-parents pour le week-end. Vient le soir, le moment de la prière avant d’aller au lit – oui car Florence a la chance d’avoir des grands-parents qui prient avec elle. Florence et ses grands-parents rejoignent le petit coin-prière aménagé dans le salon. On allume la bougie. La petite fille s’assied devant l’icône de Jésus et celle de Marie. Et tout fort elle dit :

Bonsoir Jésus, bonsoir Marie. Je t’aime, Jésus, je t’aime Marie.

…au passage, confession de foi et louange, tout à la fois ! Avec son cœur d’enfant, elle a tout compris.

Et puis la petite fille regarde ses grands-parents qui prient silencieusement, les yeux fermés, et elle s’exclame :

Grand-Papa, tu dis rien ??

Bah heu… Si, répond l’homme : Bénissez Papa et Maman, bénissez Florence…

– Non, non, non, Grand-Papa, c’est pas ça qu’on dit !

Alors le grand-père, un peu interloqué, regarde sa petite fille et lui demande :

– Ah bon ? Qu’est-ce qu’on dit ?

– D’abord tu leur dis « bonsoir ».

Merveilleuse logique des enfants… Comment demander quoi que ce soit à qui que ce soit avant même de l’avoir salué ? On ne commence pas par « Donne nous aujourd’hui notre pain de ce jour » ! On commence par saluer : « Notre Père… »

Le grand-père s’exécute, un petit peu gêné, regardant les deux icônes et balbutiant :

Bonsoir Jésus, bonsoir Marie…

…Peut-être ne l’avait-il jamais fait, devant ces deux icônes… Pensez à saluer les icônes s’il y en a chez vous, tout à l’heure en rentrant…

Et puis il continue :

Bénissez Papa et Maman, bénissez Florence…

Non, non, non ! dit encore la petite Florence. Maintenant tu leur dis : « Je t’aime » !

Alors encore plus gêné, le grand-père reprend :

Bonsoir Jésus, bonsoir Marie. Je vous aime.

Et puis il se racle la gorge d’émotion, et il n’ose plus rien dire, de peur que cela ne convienne encore pas à sa petite-fille au caractère décidément bien trempé.

Satisfaite, la petite Florence regarde son grand-papa, puis elle regarde la bougie et les deux icônes, et elle déclare toute joyeuse :

Voilà Grand-Papa, maintenant que tu leur as dit ça, tu sais, tu peux leur demander tout ce que tu veux…

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Genève, St Nicolas-de-Flüe, samedi 23 juillet 2016, 17.00

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2 Responses

  1. Lise

    Quelle belle explication, tout c’est déroulé devant moi comme un film. Venant un enfant, encore plus touchant. Je remerciais pour ma journée avant de demander, mais maintenant , je vais dire , bonjour ou bonsoir Jésus et à Marire et je Vous aime . Merci pour cette belle explication très très clair . Union de prière. Merci Seigneur de mettre des gens sur mon chemin pour me faire comprendre et réaliser tes Paroles ! Je t’aime Jésus et je t’aime maman Marie.

  2. GUYON

    Bonjour,

    Ne dit-on pas que la vérité sort de la bouche des enfants!!!
    Dire qu’à l’époque de Jésus les enfants n’avaient pas à se prononcer.
     » Laisser venir à moi les petits enfants « 

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