Devenir des demeurés du Christ !

Photo libre de droits : une vigne à Satigny (GE).

 

Homélie pour le 5e dimanche de Pâques B

Actes 9,26-31 / Psaume 21 / 1 Jean 3,18-24  / Jean 15,1-8

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Si je vous traite de demeurés, je ne suis pas certain que l’un ou l’autre d’entre vous m’invite à manger prochainement chez lui !

Et pourtant, au premier degré, être demeuré c’est justement être quelqu’un qui demeure, qui reste à la maison.

Alors d’accord, c’est un peu facile, vu comme ça dans un premier temps. Mais la demeure, c’est un thème très important dans la Bible. Et le fait de demeurer aussi. Tout l’enjeu des textes que nous avons entendus ce matin est de DEMEURER dans l’amour.

C’est un très beau verbe, le verbe demeurer ! Il évoque à la fois la maison – la demeure – mais aussi la persévérance, la stabilité, la confiance. On demeure envers et contre tout. On a une ligne, on s’y tient. On a les deux pieds bien plantés au sol. Être stable, au fond, c’est demeurer. D’ailleurs en hébreu, dans la langue de Jésus, c’est la même idée, la stabilité et la demeure.

En ce sens je préfère largement être traité de demeuré que d’instable.

« Demeurez en moi, dit Jésus, comme je demeure en vous. »

Comme très souvent avec Jésus, on a bien retenu la première partie de la phrase mais pas forcément la deuxième. L’important, dans cette phrase, c’est le COMME. « Demeurez en moi COMME je demeure en vous. »

C’est le même principe que « Aimez-vous les uns les autres COMME je vous ai aimés. », ou que « Aime ton prochain COMME toi-même. » Deux autres phrases de Jésus.

A chaque fois la première partie de la phrase, ça va bien ! « Aime ton prochain », on comprend. Il y a assez de bulletins de versement qui nous arrivent dans la boîte aux lettres pour nous le rappeler. « Aime ton prochain », on comprend bien.

Mais « Aime ton prochain COMME toi-même »…

Si tu te dénigres toi-même, c’est comme ça que tu risques de traiter ton prochain, mon ami…

Si tous les matins tu te dis : « Quel imbécile je fais ! Qu’est-ce que je suis nul ! », eh bien c’est comme ça que tu vas traiter ton prochain.

Aime ton prochain comme toi-même, sois aussi indulgent avec toi-même que tu l’es avec les autres. Et vice versa : sois aussi indulgent avec les autres que tu l’es avec toi-même.

Alors c’est le même principe pour « demeurez en moi comme je demeure en vous », tout est dans le « comme ». C’est la même idée avec cette histoire de vigne, de sarments, de vigneron, de fruits que nous venons de réentendre.

Ce sont des images qui nous parlent, dans la région, les images liées à la vigne…

Je ne sais pas si vous avez déjà essayé de déterrer un sarment de vigne… mais vous pouvez demander aux vignerons : bon courage ! C’est solidement planté dans le sol, un sarment de vigne ! Ça demeure bien en terre. Et c’est justement l’image que Jésus prend pour parler de ce que nous devons être : des demeurés dans la vigne.

Vous avez entendu l’évangile. Pour une fois, d’ailleurs, Jésus nous explique les images qu’il prend : le vigneron, dit-il, c’est le Père. La vigne, c’est le Christ. Et les sarments, c’est nous. Et le défi c’est de demeurer stables dans cette vigne. En Christ. Pour porter, ensuite, du fruit.

Parce que Jésus nous le dit : c’est justement celui qui demeure en lui qui portera du fruit, beaucoup de fruit.

Demeurer planté profondément dans la vigne. Etre un sarment que n’importe quelle coulée de boue ou glissement de terrain n’arrache pas, c’est ça notre défi.

Alors qu’est-ce que ça signifie dans nos vies ?

D’abord, si l’on écoute bien Jésus, il s’agit de demeurer en lui comme il demeure en nous.

Alors commençons par nous demander : qu’est-ce que c’est « Jésus qui demeure en nous » ? Qu’est-ce que ça veut dire ?

Comment Jésus demeure-t-il en nous ? Vient-il faire sa demeure dans nos cœurs ?

Mais la réponse est « oui », bien évidemment, d’ailleurs vous êtes là pour ça.

Les premiers communiants qui étaient en retraite hier l’ont parfaitement bien compris : à chaque eucharistie, à chaque fois que nous communions, Dieu vient faire sa demeure en nous.

Et jadis – ceux parmi nous qui sont jeunes depuis plus longtemps que les autres s’en souviennent bien – jadis on pratiquait le jeûne eucharistique parfois des heures avant la messe, parfois depuis la veille au soir. Heureusement que la messe était à six heures du matin parce qu’on était un petit peu tremblotant en arrivant !

Mais est-ce qu’on a vraiment interrogé cette pratique ? Qu’est-ce qui est le plus important ? Se vider les entrailles des heures avant pour faire une place au Christ – on comprend bien l’idée – ou veiller à ce qu’on va rajouter par-dessus dix minutes après la messe à l’apéro ?

Parce qu’à ce moment-là il est présent ! La veille au soir il n’y est pas, hein ! Mais dix minutes après la messe, il est là, il est en nous !

C’est peut-être là qu’on devrait faire attention à ce que l’on rajoute par-dessus, à ce qui sort de nos lèvres… C’est peut-être quand il est en nous qu’on devrait prendre conscience de sa présence… plutôt que de faire tous les efforts du monde avant la messe.

Tout à l’heure nous recevrons l’Eucharistie et, une fois de plus, le Christ viendra demeurer en nous. Est-ce que nous l’accueillons comme ça, sans y penser, par habitude ? Simple petite hostie du dimanche ?

Mais quand on reçoit un invité chez nous, on l’accueille pleinement, on prend du temps avec lui ! Il ne vous viendrait pas à l’idée, si quelqu’un sonne à votre porte et que vous l’avez invité, de l’installer au salon, de le faire asseoir puis de lui dire : « Bon, je te laisse, moi j’ai des courses à faire, tu sais où sont les toilettes… »

Non ! On prend du temps avec lui, on l’accueille. Et c’est la même chose pour Jésus après la communion : on l’accueille, on lui fait honneur !

Alors c’est beau de se préoccuper de faire une petite place à Jésus et de ne pas forcément engloutir deux croissants pur beurre juste avant la messe, d’accord ! Mais il me semble plus essentiel encore de se préoccuper de lui UNE FOIS QU’IL EST EN NOUS !

Le Christ vient demeurer en nous. Ce n’est quand même pas rien !

Et il nous demande de demeurer en lui de la même manière.

Alors comment est-ce qu’on demeure en lui ? C’est la deuxième partie de la question…

Bah… en faisant ce que vous faites ce matin, par exemple… En venant écouter sa parole, en venant prendre du temps pour prier, pour être avec lui…

Mais bon, prier, c’est bien mais ça ne suffit pas ! On n’est pas chrétien une heure par semaine ici à la messe ! Si je prends une métaphore footballistique : ici, c’est la mi-temps, hein ! A la mi-temps on écoute le coach – c’est moi – le président du club vient nous donner aussi ses instructions – c’est le Christ – mais le match c’est pendant la semaine qu’il se joue ! C’est pendant la semaine qu’on doit être chrétien en actes !

Et la lettre de Jean, notre deuxième lecture, le disait très bien : nous devons aimer non pas avec des paroles et des discours, mais en actes.

Nous venons ici pour écouter la parole de Jésus mais pour qu’elle se transforme en actes dans le quotidien de notre vie.

Et se transformer en actes, eh bien c’est aimer les uns les autres comme Jésus nous a aimés, c’est demeurer en lui comme il demeure en nous. Accueillir chacune, chacun comme le livre des Actes nous le rappelait.

Paul, au début, les autres disciples ne voulaient pas l’accueillir dans le groupe ! Faut dire que c’était un sacré voyou au départ !

Et c’est Barnabé qui a essayé, vous l’avez entendu dans la première lecture, qui a essayé de rappeler aux autres que Paul avait changé !

Bien sûr, il a fait des erreurs ! Mais il a changé !

Vous avez des gens, comme ça, qui étiquettent les autres sur leurs erreurs d’il y a dix ans… « Ah lui, il a fait ça il y a dix ans ! » Du coup, il est étiqueté définitivement, hein !

Je ne suis pas sûr que Jésus ait réagi vraiment comme ça…

Jésus, il accueille tout le monde, il espère le meilleur de chacun, il nous regarde toujours au mieux de nous-mêmes. Et il nous invite à regarder les autres de la même manière : à ne pas se souvenir de ce qui nous a énervé chez telle ou telle personne mais à espérer le meilleur d’elle-même.

Je crois que c’est ça aussi, demeurer en Jésus comme lui demeure en nous.

Le Christ nous espère toujours meilleurs, il nous envisage toujours sous notre meilleur jour, il croit en nous.

Si nous faisions pareil pour les autres dans notre semaine ? Ce serait magnifique !

Essayons, chers Amis, d’être des sarments bien plantés dans la vigne du Seigneur, d’être des demeurés dans sa vigne !

Aimons, autour de nous, comme il nous a aimés. Demeurons en lui et il viendra demeurer en nous.

Alors – et alors seulement – nous porterons beaucoup de fruit…

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Bex, samedi 1er mai 2021, 18.00

Aigle, dimanche 2 mai 2021, 10.00 (version enregistrée)