Le OUI de Joseph

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Solennité de Saint Joseph

2S 7,4-16 / Psaume 88 / Rm 4,13-22 / Matthieu 1,16-24a

On parle souvent du « Oui » de la Vierge Marie en le portant aux nues, ou de son « Fiat », en latin, « Que ta volonté soit faite ». Pour ma part j’en avais même fait une comédie musicale avec une trentaine de jeunes jadis, « Oui ».

Pourtant, le « Oui » de Saint Joseph m’a toujours paru beaucoup plus courageux que celui de la Vierge Marie.

C’est vrai Mesdames, qui de vous dirait « Non » à un ange qui vient vous annoncer que vous allez devenir mère du Fils de Dieu, franchement ? J’en connais pas beaucoup d’entre vous qui diraient non.

Mais, Messieurs, qui de vous dirait « Oui » à une voix céleste qui vient vous dire que votre fiancée est enceinte, par l’opération du St Esprit, et qu’il ne faut pas pour autant y voir un acte de rupture ? J’en connais pas beaucoup qui auraient eu l’incroyable courage de Joseph.

Le « Oui » de Joseph m’a donc toujours paru beaucoup plus fort que celui de Marie.

Je le disais à des Carmélites, lors d’un de mes passages dans mon Pays Basque d’origine où j’aime aller me ressourcer une fois l’an.

Un pays qui a bien des points communs avec le Valais, pour ce qui est du caractère des gens, de la douceur de vivre mais de la rudesse de la montagne, pour ce qui est de la Foi en Marie et en Joseph, et de la pratique aussi.

Face à mes hôtes Carmélites, dans ma prédication ce matin-là, jour de la Saint Joseph il y a deux ans, je faisais l’éloge du Valais en indiquant que, dans ce pays d’adoption que j’aime, la St Joseph est fériée. Et c’est bien normal. Et je déplorais, au passage, qu’il n’en fut pas ainsi au Pays Basque.

Je déplorais aussi que la statue de St Joseph, dans le choeur du monastère carme où je célébrais, soit beaucoup plus petite que celle de la Vierge Marie qui trônait de l’autre côté de l’espace liturgique.

La mère supérieure que je connais bien m’apostrophe, au petit déjeuner, et me dit : [accent basque] « Père Vincent, vous avez raison, la statue du bon St Joseph est plus petite. Mais aurez remarqué que le piédestal sur lequel elle est posée est beaucoup plus haut que le piédestal de la Vierge Marie, ce qui a pour conséquence que les deux têtes sont à la même hauteur. » Et une soeur très âgée de rajouter, un brin de malice dans la voix : « La tête de St Joseph est même un peu plus élevée… »

Et une autre de conclure : « Et puis, vous en Suisse, vous décidez tout par canton, c’est facile. Les Valaisans ont du bon sens d’avoir rendu ce jour férié. Mais nous c’est Paris qui décide, alors que voulez-vous… les païens de Parisiens sont pas près de nous l’accorder, le 19 mars ! »

Ah mes chères Carmélites de Bayonne ! Je pense souvent à elles, quand vient la St Joseph. Ou à cette autre Eglise, dans le village de mon oncle, où à la fête de St Joseph j’ai vu 14 servants de messe il n’y a pas si longtemps. Comme ici, Joseph, on l’aime bien, par chez moi.

Joseph… Le père bafoué par Jésus lui-même lorsqu’il lui assène, au Temple, qu’il ne devait pas se faire de souci puisqu’il savait qu’il se devait aux affaires de son Père qui est aux Cieux. Ça doit quand même faire bizarre à entendre, pour un père, de la part de son propre fils, qu’il n’est pas son vrai père !

C’est pour cela que j’aime bien nos lectures d’aujourd’hui. Le second livre de Samuel parle de descendance. La lettre aux Romains parle de descendance. L’évangile de Matthieu parle de descendance. A chaque fois il s’agit de la descendance à laquelle le personnage principal ne s’attendait pas. David, Abraham, et Joseph.

Un peu comme si Dieu voulait nous dire : ce n’est pas vous qui comptez, c’est votre descendance. Ce sont les fruits que vous porterez et que Dieu vous donnera.

Descendance selon la chair ou descendance spirituelle, peu importe. Dieu y pourvoit.

Comme si Dieu voulait dire à David, à Abraham, à Joseph, à nous-mêmes : vos enfants ne sont pas vos enfants. C’est le titre d’un célèbre poème de Khalil Gibran. Je vous le lis, pour terminer, parce que je me dis que Joseph l’aurait sûrement apprécié, en cette nuit où son « Oui » s’est fait gigantesque.

Vos enfants ne sont pas vos enfants (Khalil Gibran)

Vos enfants ne sont pas vos enfants

Ils sont les fils et les filles

De l’appel de la vie à elle-même.

Ils viennent à travers vous

Mais non de vous.

Et bien qu’ils soient avec vous,

Ils ne vous appartiennent pas.

Vous pouvez leur donner votre amour

Mais non pas vos pensées.

Car ils ont leurs propres pensées.

Vous pouvez accueillir leur corps

Mais pas leur âme.

Car leur âme habite la maison de demain,

Que vous ne pouvez visiter,

Pas même dans vos rêves.

Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux

Mais ne tentez pas de les faire comme vous.

Car la vie ne va pas en arrière,

Ni ne s’attarde a hier.

Vous êtes les arcs par qui vos enfants,

Comme des flèches vivantes, sont projetés.

L’archer voit le but sur le chemin de l’infini

Et il vous tend de sa puissance

Pour que ses flèches puissent voler vite et loin.

Que votre tension par la main de l’archer

Soit pour la joie.

Car de même qu’il aime la flèche qui vole,

Il aime l’arc qui est stable.

Vos enfants ne sont pas vos enfants…

Monthey (Eglise), 19 mars 2012 ; Collombey (Eglise), 19 mars 2012

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