3 visages de Dieu

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Photos DR : Visages de Marie, Amélie et France
 

Homélie pour le 5e dimanche de Pâques, A

Actes 6,1-7 / Psaume 32 / 1Pierre 2,4-9 / Jean 14,1-12

Chers Amis,

J’ai passé mon jour de repos hebdomadaire, vendredi, à Paris. Une ville avec laquelle j’entretiens une relation compliquée faite d’amour et de haine, et dans laquelle je me rends quelques fois dans l’année.

Haine parce que c’est une ville de fous dans laquelle je n’arrive toujours pas à comprendre que tant de personnes trouvent un quelconque avantage à vivre toutes au même endroit.

Amour parce que j’ai encore un oncle et une tante qui y vivent et que j’aime profondément, ainsi que de nombreux amis très chers.

Je ne sais pas si vous connaissez Paris, mais le métro à l’heure de la sortie des bureaux, c’est rock´n’roll ! La rue aussi, d’ailleurs.

Comme je devais me rendre assez vite à mon rendez-vous suivant, l’amie avec qui je venais de prendre l’apéro m’a guidé au travers des rues et des interminables couloirs du métro… au rythme de toutes les autres personnes qui arpentent la ville lumière c’est à dire au quasi pas de course.

À un moment donné je l’ai perdue de vue. Panique ! Du coup je m’arrête, et là c’est pire encore parce qu’en un instant vous devenez un obstacle dans le flot continu des individus qui vous évitent ou vous bousculent…

– Vincent, je suis là ! me dit-elle.

La voix de mon amie venait de plusieurs mètres et pas du tout dans la direction où je croyais devoir aller. Encore faut-il la retrouver du regard parmi les dizaines et dizaines de personnes qui m’entourent à cet endroit.

Enfin je la vois, me regardant avec un sourire amusé et bienveillant. D’un geste de la main elle me fait signe de la rejoindre.

– Tu viens ?

Je lui ai répondu que j’arrivais… Et que je comptais bien me laisser guider par elle, puisqu’elle connaissait le chemin

C’est là que l’Evangile du jour m’est revenu d’un coup en tête. Et spécialement l’une des plus prodigieuses phrases qu’il contient. Jésus qui dit à Thomas : Je suis le Chemin…

Quand on est paumé dans une grande ville, quelle grâce de suivre une personne en qui l’on a confiance et qui connaît le chemin.

Quand je m’arrête dans ma vie, ne sachant plus où aller, que je me fais bousculer par les événements qui vont dans tous les sens, est-ce que j’écoute la voix du Seigneur qui, quelques pas devant moi, me dit « Je suis là… tu viens ?« 

Plus tard, attablé avec deux autres amis, fiancés, dans un petit restaurant du 18e, la discussion prend un tour profond, très sincère, au point que des larmes sortent au détour du thème du rejet d’une personne par d’autres.

Une personne d’une telle valeur que l’amie que j’avais à cette table ne peut être rejetée, me disais-je. Sinon pour devenir personne-ressource à son tour. La deuxième lecture du jour nous le dit d’ailleurs : la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle. Comme j’essayais, avec son fiancé, de réconforter maladroitement mon amie, et que je m’inquiétais de la suite de leur soirée sachant qu’ils devaient ensuite participer à une fête, elle nous dit qu’elle saura bien sourire, qu’elle sait jouer la joie sur son visage.

Cette phrase, venant d’une personne que je sais profondément vraie et sincère, m’a heurté mais sur le moment je n’ai pas compris pourquoi.

Ce n’est que plus tard, en lui envoyant un message pour m’inquiéter de la suite de sa soirée, et en reparlant de ce moment-là, que la deuxième partie de la phrase de Jésus m’a sauté à la figure : Je suis la Vérité…

Lorsque l’émotion sort, les êtres sont dans la vérité. On ne joue plus.

Et dans cette vie parisienne où tout le monde joue à paraître face aux autres, à cacher ses vraies émotions, passer un moment avec quelqu’un en vérité c’est un trésor précieux.

D’un seul coup, les magnificences du trésor de l’abbaye de St Maurice que j’étais allé voir l’après-midi même exposées au Louvre, ces pierres précieuses, ces bibles richement enluminées, ces reliquaires finement ciselés, tout cela m’a semblé d’une banalité absolue face à une simple larme. Je suis la Vérité… disait Jésus.

Combien de fois, dans ma vie de tous les jours, suis-je dans le paraître ? Combien de fois est-ce que je déguise une tristesse en affichant un grand sourire, par peur du regard des autres peut-être ? Combien de fois est-ce que je cache une larme alors qu’elle fait partie du patrimoine mondial de l’humanité ? L’UNESCO devrait classer des larmes et des sourires attendris, plutôt que des paysages et des objets, pensais-je…

Reste la dernière partie de la phrase de Jésus : Je suis la Vie…

En y repensant dans ma chambre, à la nuit tombée, chez mon oncle et ma tante, j’ai revu soudain l’incroyable quartier de la Défense, avec ses gratte-ciel et ses hommes d’affaires pressés, où j’avais mangé à midi avec une autre amie qui y travaille.

Au milieu des chiffres et des gisements de pétrole qu’elle sert, sa vie est remplie de signes de Dieu, de clins-Dieu comme on dit. Et à la fin du repas, alors que nous évoquions la beauté du chemin qu’elle prend avec celui qui est certainement son futur mari, et la pauvreté de certains autres chemins de couple, je lui disais que le leur est courageux, admirable. Comme le disait le psaume d’aujourd’hui, je me disais que Dieu veille sur ceux qui mettent leur espoir en son Amour. C’est un combat, mais c’est un combat de lumière dans lequel Dieu est à leurs côtés.

– Attends, me dit-elle, c’est ça la Vie…

…C’est ça la vie…

Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie…

En quelques heures dans cette ville de fous qu’est Paris, le Seigneur s’est glissé dans trois visages de trois très chères amies pour me rappeler une de ses maximes essentielles. Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie…

Dans ma prière, le matin venu, j’ai redit leurs prénoms à toutes trois, Marie, Amélie, France.

Et j’ai remercié le Seigneur d’être passé à travers leurs trois visages, à travers l’encombrement des rues parisiennes, à travers le mystère fragile d’une larme, à travers les incroyables événements d’un parcours vers le mariage. Marie, Amélie, France, je confie ces trois jeunes femmes à votre prière.

Et je me suis dit qu’il était dommage de garder cette réflexion pour moi, mais qu’elle ferait peut-être une homélie sympathique. Ainsi, comme le disait le livre des Actes des Apôtres dans notre première lecture, la parole de Dieu gagne du terrain, nous invitant à être à l’affût de tous les visages que prend Dieu pour nous parler, au coeur de nos journées, en vérité, sur nos chemins de vie.

Puisqu’il a lui-même trois visages, Père, Fils et Esprit, pourquoi ne prendrait-il pas régulièrement trois autres visages pour nous rencontrer au coeur de nos journées ?

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Chermignon d’en Haut, samedi 17 mai, 18.30

Chermignon d’en Bas, dimanche 18 mai, 9.00

Crans sur Sierre, dimanche 18 mai 2014, 18.00

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  1. Jean-Jacques Raviglione

    Très beau, parce que très vrai. Et réciproquement…
    Merci Amélie, Marie, France et Vincent. Et à travers vous Jésus.

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