Avons-nous faim, oui ou non ?

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Homélie pour la solennité de la FÊTE DIEU année A

Deutéronome 8,2-16a / Psaume 147 / 1Corinthiens 10,16-17 / Jean 6,51-58

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

Avez-vous faim ?… Je reconnais que la question est un peu saugrenue à 10 h. 20 du matin !

Je vous repose pourtant la question : avez-vous faim ?… Ah je vois qu’il y en a qui commencent à dire oui…

Ne sommes-nous pas rassemblés pour… un repas ? N’est-ce pas là, en plus, le repas le plus important de notre journée ? Celui qui nous nourrit de Dieu, celui qui nourrit notre âme ?

Je ne vous ai pas demandé si vos CORPS avaient faim, je vous ai demandé : avez-vous faim ?

Voyez-vous Chers Amis, avant-hier, comme chaque vendredi depuis la fin du confinement, je suis passé voir deux de nos paroissiennes, chacune chez elle, après la messe que j’ai célébrée ici à 8 heures 30.

Comme ces deux personnes passent leurs journées chez elles entre le lit, le canapé, vu leur grand âge et leur état de santé, on ne peut pas dire que leur corps avait spécialement faim. Et pourtant je passais leur apporter à manger, et elles avaient faim.

Elles avaient faim de Dieu. Elles avaient faim de cette petite hostie que je leur apporte chaque semaine, après l’avoir consacrée sur cet autel en présence de de la communauté.

C’est très important ce dernier point, j’y reviendrai. Car je pourrai très bien consacrer la petite hostie chez moi, mais non, je leur apporte le pain de la communauté.

Elles avaient faim du Christ, elles avaient faim de Jésus, elles avaient faim du « pain vivant », du « pain de vie ».

Curieuse expression que nous avons réentendue dans l’Evangile il y a quelques instants : le « pain de vie ». « Je suis le pain vivant, le pain de vie » nous disait Jésus… Ça doit sûrement vouloir dire que ce pain-là est beaucoup plus important que le pain du boulanger…

Ça doit même vouloir dire que ce pain-là donne la vie, Jésus nous le disait.

Ce n’est pas un simple pain que nous partageons à cette table, c’est le pain de vie.

Au-delà de l’expression, on peut se demander : « qu’est-ce que c’est, le pain de vie ?… qu’est-ce que c’est ? » En apparence une toute petite galette, mais en vérité, qu’est-ce que c’est ?

C’est la question que se posaient les Hébreux dans le désert. Dans la première lecture, on rappelait l’expérience un peu traumatisante du peuple au désert, lorsqu’ils ont reçu de Dieu la manne. Et ce mot, manne, vient de la langue hébraïque « mân-hou », qui veut dire précisément « qu’est-ce que c’est ? ». Eux aussi se sont demandé quelle était cette nourriture mystérieuse venue du Ciel…

Alors qu’est-ce que c’est, ce pain de vie ? Eh bien non, ce n’est pas que la petite hostie que nous recevons et que nous fêtons aujourd’hui, le Saint Sacrement. Le Pain de Vie c’est l’ensemble de ce repas que nous sommes venus prendre ensemble ce matin. L’ensemble de la Communion.

Je vais y revenir car c’est la deuxième lecture qui nous aidait à comprendre cela. St Paul dit que le pain que nous rompons lorsque nous nous rassemblons au nom du Seigneur, le pain est COMMUNION au Corps du Christ.

On a un petit peu tendance à l’oublier. Ce n’est pas seulement le Corps du Christ, c’est un pain de communion.

Il faut donc être en communion les uns avec les autres, et en communion avec Dieu, pour s’approcher de cette table. Et ce n’est pas toujours simple. Parce que nous sommes des êtres humains.

Mais si chacun de nous vient ici individuellement pour recevoir sa petite hostie à lui ou à elle puis repartir, je n’appelle pas ça une « communion ».

Être en communion, exactement comme les membres d’une chorale essaient de faire communion pour chanter – chacun à sa manière certes – un même chant, une même partition, être en communion c’est faire attention les uns aux autres comme nous le faisons depuis la fin du confinement.

Faire attention, regarder, se préoccuper les uns des autres, c’est ça aussi, faire communion.

Paul ajoute à notre sujet vous l’avez entendu, que nous sommes un seul corps lorsque nous venons ici, puisqu’il n’y a qu’un seul pain et qu’il est lui-même le Corps du Christ. Nous devenons un seul corps ! C’est une sacrée communion !

Enfin, dans l’Evangile, Jésus nous rappelait qu’il a donné ce pain « pour que le monde ait la vie. » Pas seulement nous ! Pour que le monde ait la vie.

C’est dire alors que nous ne venons pas prendre ce repas uniquement pour nous ou uniquement pour la communion de notre communauté, mais que nous avons quelque chose à apporter au monde, ensuite… « Je vous donne ce pain pour que le monde ait la vie… »

Le confinement que nous venons de traverser, Chers Amis, a aiguisé en nous cette faim du pain qui donne la vie puisque, pour la plupart d’entre nous, nous avons été contraints au jeûne de ce pain de vie. Le temps du confinement a creusé en nous la faim du pain de vie.

Exactement ce que nous disait la première lecture : « J’ai creusé en vous la faim… »

…Avez-vous faim de ce pain vivant qu’est Jésus, comme le disait l’Evangile ?

…Avez-vous faim de cette manne que nos ancêtres ont mangée pour la première fois dans le désert, jadis ?

…Avez-vous faim du Corps du Christ pour que notre communauté qui est là soit nourrie, fasse toujours plus un seul corps, et donne la vie au monde qui l’entoure ?

…Avez-vous faim de ce pain de froment dont parlait le psaume, ce morceau de pain tout petit et pourtant capable de nourrir notre âme tout entière ?

Je vous repose la question, Chers Amis : avez-vous faim ?

…Eh Oui ! Bien sûr que nous avons faim ! Nous sommes même affamés !

Pourquoi aller à la messe sinon parce que nous avons faim ?

Si c’est simplement pour écouter gratuitement de très beaux chants, notre merveilleux organiste et notre formidable chorale, c’est déjà merveilleux… mais – pardonnez-moi – ce serait un peu pauvre si c’était la seule motivation de venir ici. Ce serait un concert !

Mais vous sentez bien qu’il y a plus ! Nous sommes tous, vous la chorale, Tarcisio notre organiste, nos lecteurs, nos lectrices, nos auxiliaires, les personnes qui vous ont accueillis, et nous les prêtres, nous sommes tous au service de quelque chose de beaucoup plus grand que nous, que nous venons chercher ici.

Nous allons à la messe pour nous nourrir. Pour nourrir notre âme, notre cœur. Et cette nourriture se prend à DEUX tables, comme le rappelaient les pères du Concile Vatican II, jadis.

La table de l’Eucharistie, celle-ci, bien sûr, à laquelle nous recevons le pain des anges, comme on l’appelle aussi. Mais également la table de la Parole, celle-là, à laquelle nous nous nourrissons de la Parole de Dieu à travers les textes de la Bible que nous écoutons…

Si on appelle l’ensemble de ce repas « la communion » c’est bien parce que nous sommes alors en communion non seulement avec Dieu par sa Parole, mais aussi les uns avec les autres. D’où le nom de « communauté », d’ailleurs.

La « communauté » c’est l’ensemble de celles et ceux qui sont en « communion ».

Une communauté chrétienne a-t-elle besoin de la messe ? Oui c’est évident. C’est ce qui solidifie sa communion. Mais elle doit être nourrie aux deux tables. Il ne suffirait pas de nous nourrir du Corps du Christ.

Et chaque personne à qui je vais apporter le Corps du Christ à la maison, je prends aussi le temps de la nourrir avec la Parole du jour.

La vraie question, Chers Amis, que nous devons nous poser est donc : « Est-ce que j’ai faim ? Est-ce que mon âme a faim de Jésus ? Est-ce que je me dis que je devrais nourrir mon âme ? »

La réponse que vous apportez à cette question est « oui » puisque vous êtes ici ce matin.

Si j’ai faim de Jésus, si j’ai compris qu’il était une nourriture pour moi, une nourriture spirituelle. Une nourriture certainement beaucoup plus essentielle encore que petit-déjeuner, le repas de midi ou celui du soir…

Si j’ai expérimenté jusque dans mon cœur le bien que cela me fait de recevoir Jésus, si j’ai soif de sa Parole, si j’ai faim du pain des anges, alors voilà une excellente raison de venir ici, avec mes frères et sœurs, pour faire communauté, peut-être même est-ce la seule la seule bonne raison de venir ici, Chers Amis.

La seule question essentielle que devrait se poser toute communauté chrétienne, particulièrement en cette Fête-Dieu, c’est : « Est-ce que nous avons faim du Christ ? »

Toutes les autres questions sont subordonnées, sont annexes.

Alors Jésus, toi que je sers à ces deux tables depuis exactement dix ans ce week-end, je souhaite que ce soit la seule vraie question qui anime le cœur de tes fidèles, le cœur de tes prêtres, le cœur des successeurs des Apôtres que sont nos Evêques.

La seule vraie question à se poser en cette Fête-Dieu. Avons-nous faim de toi, oui ou non ?

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Aigle, dimanche 14 juin 2020, 10.00 (version enregistrée)

et dans une version plus étoffée la veille :

Saint Nicolas-de-Flüe, Genève, samedi 13 juin 2020, 17.00

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