De Clément à François

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Photo DR : francetvinfo.fr

Homélie pour la PATRONALE SAINT CLEMENT

Jérémie 1,4-9 / Psaume 99(100) / 1Corinthiens 1,10-13;17-18 / Jean 13,12-17

Chers Amis,

Imaginez deux secondes…

Vous êtes musulman. Vu que vous avez un minaret en guise de clocher à Bex, tout est possible.

Vous êtes musulman, et orphelin. Du moins le croyez vous.

Par hasard, vous rencontrez le Pape François. Vous lui racontez votre histoire.

Ce dernier apprend, toujours par hasard, qu’en réalité votre mère est en vie. Toute affaire cessante, il retrouve votre mère et vous invite à venir vivre à Rome avec elle. Grâce au Pape vous vous convertissez au Christianisme. Mieux, vous cheminez vers la prêtrise et c’est lui, le Pape François, qui vous ordonne prêtre. A sa mort, vous voyez un successeur le remplacer, puis quelques années ensuite, un autre. Qui meurt à son tour. Les Cardinaux se réunissent en conclave… et c’est votre nom qui sort, ils vous choisissent VOUS.

Ça vous semble irréaliste ? Et pourtant c’est exactement l’histoire de St Clément que je viens de vous raconter, transposée aujourd’hui. Bon, OK, il n’était pas musulman. Mais il n’était pas chrétien, au départ.

Le Pape qui a ordonné St Clément ne s’appelle pas François mais Pierre. Oui, Pierre, l’Apôtre, le premier pape de l’histoire.

Qu’auriez-vous dit si vous étiez Clément et qu’on vous choisisse comme Pape ?

« Moi ? Mais vous êtes fous ? Enfin c’est pas sérieux… il y a encore 20 ans je n’étais même pas chrétien ! Et puis je suis un homme d’études, de livres, je ne sais pas parler… Et puis je suis trop jeune… »

Ça ne vous rappelle rien ? C’est ce que vous venez d’entendre dans la première lecture, le livre de Jérémie, c’est exactement ce que Jérémie a dit à Dieu lorsque Dieu l’a appelé.

« Je ne suis qu’un enfant, Seigneur. Je ne sais pas parler !« 

Et Dieu de lui répondre, vous l’avez entendu :

« Ne dis pas ‘Je ne suis qu’un enfant’. Tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai. Ne crains pas, je suis avec toi.« 

Ne crains pas. N’aie pas peur… Tiens ça nous rappelle étrangement un autre Pape, ça. C’est Jean-Paul II qui a dit « N’ayez pas peur » depuis son balcon de la place St Pierre, au jour de son élection en 1978.

Ça me fait toujours rire d’ailleurs, quand je vois des citations sur Internet – méfiez-vous des citations sur Internet, au passage… Vous savez c’est marqué « N’ayez pas peur ! » et c’est signé Jean-Paul II.

Avec tout le respect que j’ai pour Jean-Paul II, j’ai toujours envie de dire : « Heu… vous êtes bien gentils les chéris, mais c’est une phrase de Jésus, à la base, bien avant Jean-Paul II »… – Eh oui, « N’ayez pas peur » c’est ce que Jésus dit aux disciples lorsqu’il arrive vers eux en marchant sur l’eau – et bien avant Jésus c’est une phrase de Dieu le Père au prophète Jérémie, on vient de l’entendre.

Faut se calmer avec l’attribution de tout et n’importe quoi à Jean-Paul II.

Toujours est-il que Dieu a beau nous dire « N’aie pas peur ! », si vous vous retrouvez sur ce balcon, là-bas à Rome, place St Pierre, habillé tout en blanc avec la foule qui vous acclame, je ne suis pas sûr que vous ne soyez pas morts de trouille. Moi je le serais, en tout cas.

C’est un rôle complètement crucifiant que celui de Pape.

Et c’est ce rôle que les lectures de la St Clément nous décrivent magnifiquement bien.

Jérémie : « Seigneur, c’est pas moi, tu t’es trompé, envoie quelqu’un d’autre… » et le Seigneur qui répond : « Si, c’est bien toi. N’aie pas peur, je serai avec toi, et tu parleras aux gens en mon nom… »

Paul, dans la deuxième lecture, qui essaie d’exhorter le monde à l’unité, en demandant d’éviter les divisions. Mais cela aussi c’est le rôle du Pape !

Jésus, dans l’Evangile de Jean que nous venons de réentendre, qui lave les pieds de ses disciples et qui se fait le serviteur de tous… mais cela aussi c’est le rôle du Pape. C’est même un de ses titres, vous le savez bien, il est « serviteur des serviteurs du Christ »

Et Jésus, dans l’Evangile, nous rappelait cette phrase qui va tellement bien à notre Pape actuel : « Amen, je vous le dis, le serviteur n’est pas plus grand que son maître, le messager n’est pas plus grand que celui qui l’envoie. Si vous savez cela, heureux êtes-vous, pourvu que vous le mettiez en pratique. »

Ah ben évidemment, c’est pas le tout de le savoir. On le sait tous : bien sûr que le Pape n’est pas Dieu. Jusque là tout va bien. Et lui aussi, il le sait bien.

Mais encore faut-il le mettre en pratique, nous dit Jésus.

Et alors là… dans la longue liste des successeurs de Pierre et de Clément, force est de constater qu’il y a eu un peu de friture sur la ligne… y en a quelques uns qui ont mal compris le concept de serviteur pas au-dessus de son maître, voyez…

Le Pape, à certaines époques, c’était Dieu sur terre. Rien n’était trop beau pour lui, trop luxueux, trop clinquant, trop bling-bling dirait-on aujourd’hui.

Et même Jean-Paul II, à certaines JMJ, semblait être la vedette, la star. On le lui a reproché d’ailleurs.

C’est en cela que François a fait plusieurs gestes étonnants, et une déclaration magnifique ce printemps lors d’une prière de l’angélus sur la place St Pierre. Une chose étonnante, qu’aucun de ses prédécesseurs récents n’avait fait de mémoire de médias.

Alors que la foule criait « Francesco, Francesco ! » sur la place St Pierre, il a arrêté les cris d’un geste, avec le sourire, et il a dit ceci : « Je vous remercie, cela me touche, mais ce n’est pas ‘François, François’ qu’il faut crier ! C’est ‘Jésus ! Jésus !’,c’est lui votre Dieu ! Allez-y ! Criez ‘Jésus ! Jésus !’… »

Et ça a marché. Pour la première fois lors de l’angélus du dimanche à midi, la foule sur la place s’est mise à crier « Jésus ! Jésus ! »

François a compris qu’il est le serviteur, mais en plus il le met en pratique. Clément l’avait fait, jadis.

Et nous, dans nos vies ? Dans nos paroisses ? Est-ce que nous recherchons la reconnaissance, le merci, voire les honneurs lorsque nous sommes président du conseil de communauté, du conseil de paroisse, membre de la préparation de la brisolée de la St Clément ? Le 1500e de l’Abbaye que nous allons déjà célébrer aujourd’hui par un apéritif, est-ce l’occasion de déployer des dentelles et un faste incroyable ?

Non. Nous devons nous souvenir qu’en toute chose nous sommes des serviteurs. Chacun à notre place. Et c’est cette notion de service qui doit nous habiter, à la suite de Clément, à l’exemple de François, dans la conduite de nos communautés chrétiennes.

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Bex, fête patronale, dimanche 17 novembre 2013, 10.00

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