Dieu a besoin de nous

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Image : Giovanni Lanfranco, le miracle du pain et du vin, Wikimedia

 

Homélie pour le 18ème dimanche du Temps Ordinaire

Isaïe 55,1-3 / Ps 144 / Romains 8,35.37-39 / Matthieu 14,13-21

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

J’aimerais vous faire imaginer, tout d’abord, une personne dont la maison serait atteinte par une inondation… D’accord, c’est pas tellement la saison des inondations, je sais bien. Mais imaginons quelques instants cette personne atteinte par une inondation…

L’eau monte, cerne la maison. Cet homme s’est calfeutré dans son salon. Les pompiers arrivent avec leur véhicule qui a déjà de l’eau jusqu’en haut des roues. Ils supplient cette personne de monter dans le camion :

–      Venez, Monsieur ! Il faut évacuer ! Nous sommes ici pour vous sauver !

–      Pas besoin, répond l’homme, je crois en Dieu. Je sais qu’il est mon Sauveur et qu’il viendra me délivrer.

Un peu plus tard, alors que l’eau monte toujours et que l’homme a dû se réfugier sur son balcon, à l’étage, les pompiers arrivent en barque, cette fois-ci.

–      Venez, Monsieur, n’attendez pas. L’eau monte et la pluie continue ! Venez avec nous. Nous sommes là pour vous sauver !

–      Pas besoin, je vous l’ai dit ! Je suis croyant, moi. Je sais que Dieu viendra me sauver !

Moins d’une demi-heure plus tard, l’homme est sur le toit de sa maison. L’étage a été envahi par l’eau qui continue de monter. Et cette fois c’est l’hélicoptère des pompiers qui survole la maison. Ils déroulent l’échelle de corde et un pompier descend jusqu’à l’extrémité, pendu à l’hélicoptère. Il interpelle l’homme en lui tendant la main, il peut presque le toucher :

–      Venez, Monsieur ! Il n’y a plus d’espoir. Moi seul peux vous sauver ! Montez avec moi !

–      Non ! reprend l’homme. Vous savez ce que c’est que la Foi ? Eh bien moi, je l’ai. Je sais que Dieu viendra pour me sauver.

L’eau continue de monter, engloutit ce pauvre homme qui, hélas, meurt noyé. Je vous rassure, ce n’est qu’une histoire.

L’homme arrive très irrité devant St Pierre et lui lance :

–      Eh bah c’était bien la peine de venir à la messe tous les dimanches, de croire toute ma vie ! Voilà le résultat ! Dieu m’a laissé mourir alors qu’il m’avait promis de tout faire pour me sauver !

Et derrière St Pierre, la voix de Dieu lui répond :

–      Mon Ami, je t’ai envoyé trois fois les pompiers… Que pouvais.je faire de plus ?

…Ce n’est qu’une blague, rassurez-vous !

Ce n’est qu’une blague, rassurez-vous. Mais une blague qui illustre bien une forme de foi qui serait défaillante. Il faut attendre de Dieu des miracles et notre salut, évidemment, mais pas sans notre participation. Le salut ne vient pas tout cuit du ciel. Dieu a besoin de nous pour nous sauver.

Aussi étrange que cela puisse paraître : il a besoin de nous pour nous sauver. Comme le pompier ne pouvait pas forcer l’homme à monter dans la barque, Dieu a besoin que nous fassions un pas pour nous sauver.

Dans la première lecture, le livre du prophète Isaïe, Dieu disait effectivement au peuple qu’il aurait le salut, qu’il aurait à boire et à manger gratuitement… « Voici de l’eau, même si vous n’avez pas d’argent » disait le texte.

Mais il ne fallait pas oublier le verbe qui revenait 4 fois en 3 versets, l’impératif « Venez ! »

Venez ! Sous-entendu : « Si vous ne venez pas, je ne peux rien faire pour vous sauver… » « Venez, voici de l’eau… venez vous restaurer gratuitement… mais VENEZ ! »

C’est ce que vous avez fait ce matin, précisément : vous êtes venus à l’invitation su Seigneur.

Le Seigneur nous attend, il nous tend la main. Mais il attend de nous que nous venions vers lui, que nous lui tendions nous aussi la main.

Même chose pour le psaume qui nous rappelait les bontés et les largesses du Seigneur. Le Seigneur est tendresse, pitié, plein d’amour, sa bonté est pour tous, il donne la nourriture au temps voulu… magnifique !

Mais ça ne va pas tomber tout cuit dans l’assiette car le psaume poursuivait : « Le Seigneur est proche de tous ceux qui l’invoquent en vérité »…

Qu’est-ce que ça veut dire, « invoquer le Seigneur en vérité » ?

Tant de personnes viennent vers moi en me disant : « J’ai prié, Père, j’ai prié mais ma prière n’a pas été exaucée… pourquoi ?! » Combien de fois est-ce que j’entends cela ?

Dans le cas d’une prière restée lettre morte, on peut toujours – bien sûr – se rappeler que nos vues ne sont pas celles de Dieu, que pour lui mille ans sont comme un jour, comme le dit aussi un psaume, etc, etc…

Mais on peut aussi se demander : « Est-ce que j’ai prié de tout mon cœur, de toute mon âme, de toute ma force ? Est-ce que j’ai invoqué le Seigneur en vérité ? »

Parce qu’alors là, il peut faire des miracles.

Mais est-ce que je l’ai vraiment invoqué en vérité ?

Ou est-ce que j’ai dit : « Seigneur, je ne voudrais pas vous déranger, vous avez mille choses à faire, mais si vous avez une petite seconde pour moi… » Non ! C’est pas ça, invoquer le Seigneur en vérité. C’est être persuadé qu’il peut me sauver, moi. C’est ça, invoquer le Seigneur en vérité.

Rien ni personne ne peut nous séparer de l’Amour infini de Dieu, Paul le disait très bien. Pas même la mort.

Le brave homme de mon histoire, noyé par cette inondation, a fini par rejoindre Dieu, je vous le signale ! Certes, ça lui fait une belle jambe. Mais tout de même, nous avons la certitude de rejoindre la lumière tôt ou tard.

Mais entre deux, à nous de tendre la main pour être sauvés. À nous de nous laisser faire pour que Dieu puisse commettre un miracle.

C’était exactement le sens de cet Evangile que nous connaissons par cœur, l’histoire de la multiplication des pains.

Jésus peut multiplier les pains. Il n’a pas besoin de nous pour cela, au départ. Ni de qui que ce soit, d’ailleurs.

Mais il dit aux disciples : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! »

… Donnez-leur vous-mêmes à manger !… sous-entendu : « Je ne le ferai pas sans vous ! »

Bien sûr qu’il pourrait le faire tout seul. Il est Dieu. Mais il nous dit : « Je ne le ferai pas sans vous. Donnez-leur vous-mêmes à manger.»

–      Mais Seigneur, on n’a rien, rien que cinq pains et deux poissons !

Alors d’abord ce n’est pas « rien »… mais effectivement pour une foule de cinq mille hommes, et probablement plus du double puisqu’on nous a précisé qu’on n’avait pas compté les femmes ni les enfants, pour une telle foule, 5 pains et deux poissons c’est un peu léger.

Mais à chaque fois que nous objectons, dans nos vies, en disant :

–      Mais Seigneur, je n’ai que cela. C’est insuffisant !

À chaque fois le Seigneur nous répond :

–      Eh bien viens ! Viens avec le peu que tu as. Tu verras, ça suffira.  Si tu collabores à ma tâche, je ferai des miracles avec le peu que tu as, à condition que tu viennes !

–      Seigneur, on n’a plus assez de prêtres, on n’a plus qu’une ou deux novices dans nos monastères…

–      Eh bien apportez-les moi ! Vous allez voir ce que je suis capable d’en faire, si vous collaborez avec moi. Mais il faut y croire !

–      Seigneur, on n’a plus du tout assez de bénévoles pour faire tourner la paroisse, pour faire tourner notre association, on n’a plus assez de gens qui s’engagent dans nos communautés, pour le bien commun…

–      Eh bien venez avec ceux que vous avez. Vous verrez. On fera des miracles ensemble. Mais pour ça, il faut venir. Avec ce que nous avons. Avec le peu que nous avons.

Alors, Chers Amis, n’hésitons jamais à tendre la main à Dieu. Il prend parfois des formes humaines, comme les pompiers de ma petite histoire de tout à l’heure, mais c’est lui !

Il est là, toujours, au creux de chaque manque, de chaque difficulté, de chaque souffrance. Il est là. Il nous tend la main et il nous dit de tendre à notre tour notre main à nous, de nous accrocher, de faire notre part du boulot, alors – et alors seulement, avec nous – il pourra faire un miracle.

Amen.

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Carmel de Bayonne, Pays Basque, dimanche 2 août 2020, 8.30

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