Dieu sur chaque visage

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Homélie pour la solennité du JOUR DE NOËL

Isaïe 52,7-10 / Psaume 97(98) / Hébreux 1, 1-6 / Jean 1,1-18

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Quelqu’un me disait l’autre jour :« Noël est tôt, cette année, non ? »

Voilà une phrase qu’on peut dire pour Pâques, de fait… suivant les années bien sûr, mais pour Noël, non… je fus au regret de confirmer à mon interlocuteur que, cette année encore, Noël tombe un 25 décembre, mais oui.

Même si l’année semble passer comme l’éclair (celle-ci peut-être un peu moins que les autres)

… même si le mois de décembre a semblé passer très vite aussi…

… même s’il a été rythmé par tous les messages d’espérance de nos paroissiens sur notre chaîne YouTube, ce matin encore.

Peut-être avez-vous fêté hier soir, avec les restrictions d’usage, n’est-ce pas, et le bon nombre de personnes…

…peut-être avez-vous veillé tard, célébré la messe de minuit avec notre évêque à la télévision…

…peut-être étiez-vous déjà à l’une des 24 célébrations que nous vous avons proposées depuis samedi…

…peut-être avez-vous les yeux encore un peu ensommeillés. Vous regardez alors cette crèche avec le regard un peu flou, un peu trouble des lendemains de fête… C’est joli.

Peut-être au contraire êtes-vous bien éveillés, le repas de Noël attend dans le four et vous êtes en train de vous demander si je ne vais pas être trop long parce qu’il ne faudrait quand même pas que ce soit brûlé !

Vous alors, vous regardez cette crèche avec empressement, sans y faire trop attention. C’est joli. Bon. La suite !

Quand j’étais enfant, et que je servais la messe, je regardais le prêtre s’agenouiller devant la crèche au moment de Noël.

Ce prêtre était beaucoup plus grand que moi et je le regardais d’en-bas, il m’impressionnait beaucoup.

Je me disais que si lui, tellement grand à mes yeux, se faisait tout petit devant un tout petit bébé, c’est qu’il y avait là un grand mystère, quelque chose de forcément immense que je ne comprenais pas bien.

Tout à l’heure, Chers Amis, avant de sortir, n’oubliez pas de regarder cette crèche, de passer devant – à distance les uns des autres mais… – de passer devant, de vous y arrêter intensément… Vous êtes devant l’un des plus merveilleux mystères, devant l’une des choses les plus surprenantes de toute l’histoire des religions.

Nous les Chrétiens, nous sommes les seuls au monde à avoir cette vision-là de Dieu.

Un Dieu qui n’est pas un vieux barbu tout là-haut, distant de nous, complètement étranger à nos problèmes…

Un Dieu qui n’est pas un Dieu vengeur auquel on croit encore trop souvent, qui de temps en temps piquerait une sainte colère avec des éclairs et de la foudre dans tous les sens.

Un Dieu qui n’envoie évidemment pas de Coronavirus, Dieu ne veut jamais le Mal…

Un Dieu qui ne soumet personne à qui que ce soit ou quoi que ce soit, qui n’a pas besoin qu’on lui sacrifie qui que ce soit…

Non… notre Dieu. C’est un bébé. C’est un petit enfant. Il est là, fragile, humble. Il nous rejoint dans notre fragilité humaine, jusque dans nos faiblesses. Il se fait l’un de nous.

Comme les bébés que nous connaissons, tendres, avec cette immense confiance qu’ont les tout-petits lorsqu’ils s’endorment contre leur Maman.

Voilà notre Dieu.

Et Dieu a cette même confiance… en nous. Il est notre Dieu, et il nous fait une entière confiance, il s’endort contre le monde comme ce petit enfant contre sa mère.

Je viens de vous proclamer le fameux Prologue de Saint Jean qu’on lit traditionnellement le 25 au matin qui était lu, jadis – pour qui qui sont jeunes depuis plus longtemps que les autres parmi nous – qui était lu jadis à la fin de chaque messe. Ces pages comptent parmi les plus belles de la Bible.

L’Evangéliste commence par nous rappeler qui est Dieu, Tout-Puissant, Créateur [Rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes].

Prenons soin de notre Dieu, c’est lui qui nous a créés. Prenons soin de sa création qui nous entoure, de la magnifique nature qui nous est confiée. C’est lui qui l’a créée.

Regardez – il en tombait juste à l’entrée de notre messe – regardez un flocon de neige, ou au contraire regardez un sommet de granit, regardez les étoiles, regardez l’immensité de l’océan, regardez la beauté de notre nature, et vous croirez en Dieu.

Saint Jean nous dit ensuite que Dieu envoie des hommes comme Jean le Baptiste pour témoigner de lui, pour l’annoncer, pour baptiser, pour célébrer. Ces hommes que Dieu envoie, aujourd’hui, nous les appelons des prêtres. Et il continue d’en envoyer pour célébrer, pour baptiser, pour annoncer, pour enseigner.

Prenons soin de nos prêtres, chers Amis. Ce sont souvent des hommes seuls et ils le sont parfois encore davantage aujourd’hui. A leur sujet, au sujet de tous ceux qui, comme Jean le Baptiste, annoncent Dieu et parlent de lui, le texte nous disait : [Cet homme n’était pas la lumière, mais il était là pour lui rendre témoignage].

Un prêtre n’est pas une star, Nous ne sommes pas des lumières, et nous le savons bien ! Nous sommes juste là pour rendre témoignage à la lumière, ce n’est pas pareil !

Nous sommes le doigt qui montre la lumière (et Dieu sait combien de personnes regardent le doigt alors qu’il s’agit de regarder ce que montrent les Jean-Baptiste d’aujourd’hui !).

C’est aussi ce que sont les prophètes dont parlait notre deuxième lecture, la lettre aux Hébreux. Dieu parle par les prophètes. Et très souvent on ne les écoute pas, ils dérangent.

Qui sont les prophètes d’aujourd’hui ? Mais c’est vous ! De par notre baptême, nous sommes prêtres, prophètes et rois ! Et quelqu’un me disait hier soir : « Oh vous savez, j’ai essayé de parler de Dieu à mes petits-enfants mais ce n’est pas facile… ce n’est pas facile… » Les prophètes dérangent, c’est normal ! Ce n’est pas pour cela qu’ils doivent se taire ! Il faut continuer à être des prophètes !

Posons-nous la question nous-mêmes de ce qui nous dérange, dans nos existences ? Qui a un discours qui nous dérange, qui vient heurter nos petites habitudes, nos conforts, nos richesses ?

Peut-être s’agit-il d’un prophète, parce que le jour où la parole de Dieu ne dérange plus, alors c’est que nous aurons vraiment tout perdu. Ou que nous serons parvenus dans le Royaume, c’est selon.

Enfin, l’Evangéliste nous dit ce qu’a fait le Verbe, une des personnes qui sont, à trois, notre Dieu. [Il est venu chez les siens… le Verbe s’est fait chair]… C’est de NOUS qu’il parle, en disant « il est venu chez les siens » !

[Il nous a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu] disait le texte. C’est de notre baptême qu’il parle !

[il a habité parmi nous]… Mais c’est de la ville d’Aigle qu’il parle !

Aigle, canton de Vaud, diocèse de Sion, 25 décembre 2020, c’est de là que parle ce texte. Parce que la Bible n’a aucun sens si nous la lisons comme de vieux textes poussiéreux ! C’est d’aujourd’hui que la Bible nous parle.

C’est aujourd’hui, ici, chez nous, qu’il vient !

Et nous savons bien comment continue l’histoire: [Il est venu chez les siens… et les siens ne l’ont pas reconnu].

Mais on pourrait aussi être tenté par un autre extrême lorsque nous regardons le petit enfant de la crèche : le voir trop humain. Oh… c’est un petit bébé, comme c’est mignon !

C’est vrai… mais c’est Dieu, aussi.

Dieu est Homme et Jésus est Dieu. L’un ne va pas sans l’autre au matin de Noël.

Et c’est la première lecture qui venait nous le rappeler, nous rappeler qui est cet enfant : « Il est roi, ton Dieu ! » disait le prophète Isaïe. Et il est roi de toutes les nations, vous l’avez aussi entendu dans ce même texte.

Alors Chers Amis, Dieu nous attend aujourd’hui. Au détour d’un rire, d’un sourire – même derrière nos masques ! – au détour de chaque visage que nous allons croiser. Pas seulement dans la crèche.

Dieu est derrière chaque regard que nous allons donner, échanger, recevoir, ce matin, cet après-midi, ce soir…

Il nous faut sa lumière pour le comprendre.

Il nous faut regarder l’autre avec le regard du Christ, ce regard qui pardonne et qui aime. Ce regard qui envisage et non pas qui dévisage.

Alors vous aussi, vous ferez advenir Dieu sur notre terre, vous serez prêtres, prophètes, et rois de ce Royaume que nous construisons ensemble.

Dieu est là, parmi nous. Fragile. Vulnérable. Et il est là, sur le visage de mon frère, de ma sœur. C’est tout le mystère du Noël des Chrétiens.

Encore une fois : JOYEUX NOËL A CHACUNE, A CHACUN !

 

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Aigle, 25 décembre 2020, 10.00

Et dans une version sensiblement différente jadis :

Evolène, 25 décembre 2018, 10.00

Montana-Station, 25 décembre 2013, 9.00

Chermignon d’en Haut, 25 décembre 2013, 10.30

Les Plans s/ Bex, 25 décembre 2013, 15.00

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  1. marc

    Tous ces visages qui me hantent
    Le reconnaîtrais-Je? voilà une angoisse qui revient chaque fois que j’ai ignoré mon prochain, chaque fois que trop pressé je n’ai pas été solidaire de sa misère matérielle, affective ou spirituelle, chaque fois que mon regard s’est fait bigleux à cause de mon égo-isme.
    Et pourtant comme le dit Jean le Baptiste, Il est au milieu de nous..et je ne suis pas digne de dénouer la courroie de sa sandale.
    Si nous voyions Jésus dans chaque visage autour de nous, nous devrions avoir beaucoup d’amour et de respect pour cette personne, à tel point de nous dire « je ne suis pas digne de dénouer le lacet de sa chaussure ». Quel respect, quelle dignité, quelle caresse…
    Ce serait un geste pour la messe, pas seulement se donner la Paix plus ou moins machinalement, mais s’arrêter, dévisager son voisin, penser tout fort un « je t’aime, et je ne suis pas digne de dénouer le lacet de ta chaussure »

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