Habitudes sous cloches

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Photo DR : unetelle.eklablog.com

Homélie pour le 22e dimanche TO, année B

Dt 4,1-2.6-8 / Ps 14 / Jc 1,17-18.21b-22. 27 / Mc 7,1-8.14-15.21-23

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Chers Amis,

Imaginez une jolie fleur. Celle que vous voudrez, je n’y connais rien en fleurs, hélas. Bon disons un géranium, il y en a encore de si beaux sur nos maisons.

Un joli géranium. En bonne santé.

Le maître de cette maison part en voyage. Il confie donc le soin de cette fleur à un ami.

Et en rentrant, ô surprise, il trouve une cloche de verre soigneusement posée par dessus le géranium. Et à l’intérieur, évidemment, le géranium tout sec, mort.

J’en ai bien pris soin, dit l’ami ! J’ai voulu le protéger pour que personne n’y touche et qu’il ne subisse ni les vents ni la grêle, je voulais qu’il reste toujours le même. Alors je l’ai mis sous cette cloche de verre.

Malheureux ! dit le Maître de maison. Qu’as-tu fait là ? Le voilà mort par ta faute, tout sec! Il fallait le laisser respirer…

Eh bien voyez-vous, chers Amis, c’est exactement cela que racontent nos textes d’aujourd’hui à propos de la loi, des règlements. Dans le livre du Deutéronome, notre première lecture, le maître de maison, Dieu, a confié à son peuple des commandements. De belles lois en fleurs. Tout en demandant à son peuple de les conserver, de veiller sur ces fleurs, de les garder, d’en prendre soin.

C’était un très beau cadeau, un présent parfait comme le dit Jacques dans la deuxième lecture. Un présent parfait parce qu’il venait de Dieu. Comme le joli géranium de mon histoire.

Il fallait l‘accueillir avec douceur, ce cadeau, comme le disait aussi Jacques. Et puis, il fallait mettre tout cela en pratique. S’en occuper, de cette parole, de ces lois, de ces géraniums. Les arroser, les laisser respirer. Leur donner l’occasion de grandir.

Mais l’Evangile montrait bien ce que certains docteurs de la loi ont fait de ces commandements. Ils les ont mis sous verre, et ils se sont asséchés, vidés de leur sève, de leur eau vive. Les docteurs de la loi ont asservi les peuples à la sécheresse de leurs lois sous verre.

Une loi qui n’est plus appliquée que pour elle-même – et c’est valable pour nos lois aussi – une loi qui n’est plus appliquée que pour elle-même parce qu’il faut faire comme ça, parce qu’on a toujours fait comme ça un point c’est tout, sans se poser de questions, cette loi se dessèche aussi sûrement qu’un géranium sous une cloche de verre.

Et Jésus – le maître de maison incarné revenu dans ce monde pour voir ce que les hommes avaient fait des cadeaux de son Père – Jésus critique très durement l’attitude des Pharisiens et des docteurs de la loi qui ont conservé le moindre petit règlement sans savoir pourquoi ils l’appliquaient au juste.

Cela vient nous interroger, chers Amis. Peut-être avons-nous, nous aussi, de ces géraniums sous cloche. Vous savez, ces habitudes pieuses. Ces choses qu’on fait parce qu’on les a toujours faites, sans se poser vraiment la question.

On met une bougie parce qu’on a toujours mis une bougie, toujours à la même place d’ailleurs.

D’ailleurs on s’assoit aussi toujours à la même place, ici, dans cette église, sans se demander pourquoi. OK, il y a des bancs vides devant… mais je ne vois pas pourquoi je changerais je me suis toujours assis là. Je vais pas changer !

On récite dix, vingt ou trente « je vous salue Marie » en un beau chapelet, mais sans âme, d’une voix monocorde – je-vous-salue-Marie-pleine-de-grace-le-Seigneur-est-avec-vous-vous-êtes-benie-entre-toutes-les-femmes… – je suis sûr que vous voyez de quoi je parle…

On donne la paix à gauche et à droite, à ceux qui sont assis à côté de nous, ça tombe bien, ce sont toujours les mêmes. Eux non plus ne changent pas de place.

Ce genre d’habitudes, chers Amis, sont comme des cloches qui dessèchent les géraniums de notre foi. On applique, parce qu’on l’a toujours fait, sans trop se demander pourquoi.

C’est confortable. Ça m’empêche de me demander, par exemple, si par hasard je ne pourrais pas une fois donner la paix à une personne qui est de l’autre côté de l’église et qui, elle, aurait peut-être besoin de ma paix. Mais ai-je le courage d’aller lui tendre la main ?

C’est confortable. Ça m’empêche de réciter peut-être un seul « Je vous salue Marie » mais tranquillement, en pensant profondément aux mots que je dis.

C’est confortable. Ça m’empêche de me demander si, par le plus grand des hasards, faire communauté ce ne serait pas se rapprocher de Dieu, à l’église. Plutôt que de remplir l’église par le fond, comme les bouteilles, de la remplir par l’avant, par le choeur de Dieu. Ahhhh l’exploit absolu : m’asseoir à côté de quelqu’un d’autre que d’habitude !

C’est confortable. Ça m’empêche de me demander si, au lieu d’allumer machinalement un de ces lumignons, pour prier pour une personne, je ne pourrais pas aller trouver cette personne, lui lancer un coup de fil, prendre le temps de l’écouter. Ça vaut toutes les bougies du monde, ça.

Alors, chers Amis, ne laissons pas nos petites habitudes – et j’en suis rempli tout comme vous – ne laissons pas nos petites habitudes scléroser notre foi. Redonnons du sens à notre pratique, faisons les choses non pas parce qu’on les a toujours faites mais parce que nous choisissons de les faire. Osons changer certaines de nos habitudes, ou alors notre foi risque bien de se dessécher sous la belle cloche en verre de notre tradition et de nos habitudes.

Ce serait un peu… cloche, c’est le cas de le dire.

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Vex, samedi 29 août 2015, 18.30

Evolène, dimanche 30 août 2015, 9.00

Hérémence, dimanche 30 août 2015, 10.30

Euseigne, dimanche 30 août 2015, 19.00

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