Jacques Martin et le bon Dieu

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Photo Twitter CerdagneFrance : l’Ecole des Fans et Jacques Martin (de dos)

 

Homélie pour la Solennité de Saint Théodule

Isaïe 61,1-3a / Psaume 88(89) / 2Timothée 1,13-14;2,1-3 / Jean 10, 11-16

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Vous souvenez-vous de Jacques Martin et de son Ecole des Fans ? Oh oui j’imagine, pour la plupart d’entre vous… même si les plus jeunes pas forcément… Chaque dimanche, il recevait des enfants sur scène, talents en herbe, on mettait des notes sur 10 (invariablement c’était 8, 9 ou 10 d’ailleurs !) et invariablement on entendait Jacques Martin dire finalement : « Tout le monde a gagné ! »

« Tout le monde a gagné ! »… car il ne fallait évidemment pas risquer de blesser un enfant par une mauvaise note ou un échec médiatique.

« Tout le monde a gagné… » disait-il de sa voix onctueuse… Et on avait parfois envie de dire : « ça c’est valable pour la télé, mon ami ! Pour les paillettes, pour le monde des contes de fées des enfants, quand tout le monde gagne ! Mais dans la vraie vie tout le monde ne gagne pas. Quand vous serez adultes, vous verrez… »

L’idée sous-jacente était pourtant très différente et Jacques Martin s’en était expliqué dans une interview : nous avons tous reçu des talents, disait-il, sans savoir forcément qu’il citait l’Evangile.

« Nous avons tous reçu des talents… certains le chant, d’autres la danse, certains un charisme particulier, l’humour… Et montrer aux enfants que tout le monde peut gagner lorsqu’on se sert de ce que l’on a reçu, eh bien ça me paraît juste. »

Je crois qu’il y a une grande sagesse derrière cette idée-là. Le seul perdant est celui qui ne fait rien de ce qu’il a reçu.

Or il existe un cadeau extraordinaire, exceptionnel que nous avons tous reçu, vous et moi, c’est l’Esprit Saint.

Notre première lecture le rappelait très bien quand le prophète Isaïe disait « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction », phrase que va d’ailleurs reprendre un certain Jésus plus tard dans une synagogue, provoquant une émeute. Mais c’est un autre Evangile encore que celui d’aujourd’hui.

Parce qu’on entend immédiatement l’objection à cette phrase – « l’Esprit du Seigneur est sur moi… j’ai reçu l’onction ! » : c’est le prophète Isaïe qui dit cela de lui-même… mais l’objection des spectateurs de Jésus pourrait être de dire : « Mais toi, qui es-tu pour prétendre avoir reçu l’onction ? »

Et imaginez notre lecteur de ce matin terminer la lecture et dire : « ce que vient de dire Isaïe, c’est pour moi aussi. J’ai reçu l’onction. Je suis l’élu ! »,

On vous aurait dit « ça va, les chevilles ? Faut que ça dégonfle un peu quand même, hein ! »

…et pourtant vous auriez pu le dire. Parce que, bien sûr, nous avons tous reçu l’onction !

Mais oui ! Nous avons tous reçu l’onction, dois-je le rappeler ? A notre baptême, nous avons reçu l’onction sur le front, réitérée lorsque nous avons confirmé notre baptême. Nous pouvons parfaitement, légitimement dire : « J’ai reçu l’onction, l’Esprit du Seigneur est en moi ! ». Chacun de vous peut le dire légitimement.

L’onction d’huile, nous l’avons reçue. Celle des prophètes et des rois de l’Ancien Testament, celle d’Isaïe, celle de Jésus, ensuite. Nous avons reçu cette onction. Tous.

Ce qui fait de nous, Paul le disait dans la deuxième lecture, des « dépositaires de l’Evangile » à « garder dans toute sa pureté grâce à l’Esprit Saint qui habite en nous ». Je reprends les termes de Paul.

Nous sommes des dépositaires de cette Bonne Nouvelle, qui a été déposée en nous, et nous avons à la garder, à la conserver, et même – nous le savons – à l’annoncer autour de nous !

Cet Esprit qui habite en nous peut s’exprimer de diverses manières, comme les enfants de l’école des fans jadis avec Jacques Martin. Certains chantent sous l’action de l’Esprit, c’est d’ailleurs ce que j’ai en chantant le psaume… le psaume qui disait précisément : « L’amour du Seigneur, sans fin je le chante ». Certains chantent sous l’action de l’Esprit Saint. D’autres sont les prophètes d’aujourd’hui, ils annoncent par leurs paroles ou par leurs actes la fidélité du Seigneur, le psaume le disait aussi.

Mais chacun de nous, Chers Amis, a reçu à sa manière de quoi mettre en œuvre l’Esprit.

Nous sommes tous différents, nous le faisons tous différemment, certes, un peu comme les brebis d’un troupeau que nous voyons dans nos montagnes. Chaque brebis a ses particularités, aucune n’est exactement identique à l’autre, chaque brebis a son caractère, chacune a son petit nom, donné par le berger. Mais le berger de ce troupeau est unique. Et pour nous, c’est le Christ.

« Trouve ta force dans la grâce qui est en Jésus-Christ » disait encore Paul dans notre deuxième lecture, lorsqu’il s’adressait à Timothée. Comme chaque brebis du troupeau trouve son courage et sa force dans la personne du berger qui guide et qui conduit.

Nous avons tous reçu cette force, reçu l’Esprit Saint. Le danger serait de continuer la phrase en disant : « nous sommes donc LES élus ».

La race élue, ça rappelle de douloureux souvenirs à celles et ceux qui ont connu les horreurs du nazisme.

Nous avons tous reçu l’Esprit-Saint, c’est juste. Nous sommes élus, c’est juste. Nous sommes LES élus, c’est FAUX. Vous sentez ? La nuance est fine !

Croire que nous sommes les seuls à avoir reçu l’Esprit, que nous sommes les seuls élus, ça c’est hérétique, ce serait faux de le dire ainsi. Mais « nous sommes élus », oui, ça c’est juste !

Et notre Evangile le disait très bien, même si c’est un passage que beaucoup ont du mal à entendre. Ce petit passage qui disait « J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie et celles-là aussi il faut que je les conduise. »

Il y a d’autres bergeries que la nôtre ! Il n’y a pas que l’Eglise Catholique Romaine, il n’y a pas que les Chrétiens… il n’y a pas que les croyants. Et ça, c’est Vatican II qui nous le dit, hein, il suffit de relire Lumen Gentium.

Le but, c’est qu’il n’y ait qu’un seul berger, bien sûr. Et notre Evangile le disait aussi : le but c’est qu’il n’y ait qu’un seul troupeau, bien sûr, mais pour l’instant il y a d’autres bergeries. Et s’il y a d’autres bergeries, il y a d’autres bergers. Parce que je n’ai jamais vu une bergerie sans berger, personnellement. Il y a donc d’autres bergers actuellement. Un jour, il n’y en aura qu’un seul, le Christ,

Dieu nous veut tous, il donne donc la grâce à chacune de ses brebis. A elles d’en faire bon usage. Mais si une brebis vient à prétendre qu’elle est l’élue – elle seule ou toutes celles de sa bergerie uniquement – alors on n’est plus dans le plan de Dieu. Plus du tout, même.

Avec Dieu, Chers Amis, comme avec Jacques Martin, à la fin, tout le monde aura gagné. A condition, tout comme dans l’école des fans de jadis, à condition de ne pas rester dans le public mais d’oser monter sur scène pour user de nos talents, de ces dons que Dieu a mis en nous.

Montons sur la scène de l’humanité, Chers Amis, sur les planches du théâtre de la vie, nous avons tous reçu l’Esprit Saint, et peu importent nos charismes, nous en avons pour annoncer l’Evangile en actes autour de nous. Peu importe aussi que nous recevions un 9, un 8 ou un 10, à la fin tout le monde aura gagné ! Tout le monde aura gagné la vie éternelle pour peu qu’on ait fait usage de cet Esprit qui est en nous.

Et ça c’est une sacrée bonne nouvelle qu’il nous faut annoncer encore et encore.

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Les Plans sur Bex, dimanche 16 août 2020, 11.45

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