Le monde est une femme enceinte

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Photo DR : casafree.com

 

Homélie pour le 1er dimanche de l’Avent C

 

Jérémie 33,14-16 / Psaume 24  /  1Thessaloniciens 3,12-4,2 / Luc 21,25-36

 

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Est-ce que votre Grand-Maman est par là, dans l’assemblée ? Pour certains, oui…

Moi, j’avais une Grand-Maman qui s’appelait Mita. C’était un diminutif de son vrai prénom parce qu’elle s’appelait Antoinette. Mais on l’appelait Mita.

Et ma Grand-Maman Mita, elle est née en 1899 et elle est décédée en 2001, à 101 ans… Elle a vécu sur trois siècles et deux millénaires… Elle a vécu tout le 20e siècle. Eh bien ça l’énervait prodigieusement – parce qu’elle a gardé toute sa tête jusqu’au bout – ça l’énervait prodigieusement quand elle entendait une petite phrase qu’on entend souvent « c’était tellement mieux avant ». Elle ne supportait pas cette phrase, « c’était mieux avant »…

Et c’est vrai qu’on l’entend, on l’entend parfois, cette phrase… et puis on la dit, des fois, aussi… « C’était mieux avant »…

Elle qui avait vécu deux guerres mondiales, qui s’était engagée dans la Croix-Rouge pour se dévouer auprès de ses semblables, pour soulager les misères humaines, elle savait bien que, non, c’était pas mieux avant.

Elle aimait à me rappeler, quand je discutais avec elle, qu’elle avait vu arriver plein de choses pendant le 20e siècle… l’avion, le néon, le congélateur, les mouchoirs de poche en papier, l’aérosol, la télévision, la montre à quartz, le scotch, le nylon, le stylo-bille, le micro-ondes, le transistor, le velcro, le code-barres, le pacemaker, le laser, le micro-processeur, l’ordinateur, l’imagerie médicale, la carte à puce, le GPS, le CD, Internet, mais aussi l’aspirateur, les cornflakes, la cellophane, le feu rouge, le feu vert, le chewing-gum, le téflon… et plein d’autres choses encore.

Et quand je lui ai demandé du haut de mes jeunes années à l’époque, le progrès le plus important à ses yeux, dans tout cela, elle m’a dit : « La paix ». Et ses yeux se sont illuminés quand elle m’a dit « la paix »…

Parce qu’elle, elle avait connu la guerre. Elle savait les misères que peut faire l’homme. Elle voyait bien qu’il y a toujours des guerres mais… « c’est plus comme avant », disait-elle. Et dans son « C’est plus comme avant », il n’y avait pas du tout la nostalgie de l’ancien temps, mais bien au contraire la joie de celle qui a évolué, de l’être humain qui évolue toujours plus.

« C’est plus comme avant, c’est BIEN MIEUX ! » me disait-elle. « Et ce sera encore mieux demain ! Quelle chance tu as de tout ce que tu vas voir dans ta vie ! » me disait ma Grand-Maman.

J’ai une famille, chers Amis, qui a vécu en France. Ça veut dire un arrière grand-père dans les tranchées, à Verdun, en 1914, un grand-oncle prisonnier dans les camps de la mort en 42, ma Maman et mon Papa, dans leur enfance, sous les bombes à Paris… Et puis mon Père soldat à la guerre d’Algérie alors que Maman attendait leur premier enfant.

Quand on a ces sujets-là autour de la table familiale, on n’oublie pas. Parce qu’il ne faut jamais oublier. On les évoque parfois. Ça nous est arrivé dernièrement encore. Mais on se réjouit de ce que l’homme a évolué. De ce que le monde évolue, heureusement.

Au fond… « le monde est en grossesse », me disait un ami prêtre. Le monde est en train d’enfanter. Il prépare peu à peu, siècle après siècle, les enfants de Dieu que nous sommes tous appelés à devenir, un jour.

[aux enfants] : Vous avez déjà vue une femme enceinte, qui attend un enfant ? Oui ? Est-ce qu’elle est belle ?

…c’est difficile de répondre à cette question…

Une amie qui attendait son deuxième enfant me disait : « Je vais repasser en mode « baleine ». » Et c’est vrai qu’aux yeux des canons de la mode, une femme enceinte vous la verrez rarement en couverture d’un catalogue ! Et pourtant, elle est belle !

Elle est très belle, une femme qui attend un enfant. Elle est pas belle comme l’estime la mode, mais elle belle autrement.

Elle est infiniment belle de ce qu’elle construit à l’intérieur d’elle-même.

Alors quand nous voyons le monde tel qu’il est maintenant, nous nous disons peut-être en regardant les informations que c’est pas beau, qu’il y a des problèmes, que c’est difficile… Que les hommes continuent à se faire la guerre, quelque part. Mais le monde est comme une femme enceinte. Il attend les enfants de Dieu – c’est nous. Il attend qu’on devienne un jour plus intelligents que ce que nous sommes aujourd’hui. Il attend d’enfanter des Fils de Dieu…

Alors bien sûr, la grossesse ça passe par des moments difficiles, hein. Si vous avez vu votre maman attendre un bébé, vous savez que c’est pas facile… il y a des jours de nausée, Mesdames, il y a des sueurs, des bouffées de chaleur, des envies… C’est pas facile !

Et c’est aussi le cas pour le monde. Il y a des guerres, des catastrophes naturelles, des soulèvements, des difficultés…

Mais le monde fabrique des enfants de Dieu comme la femme enceinte fabrique un petit bébé.

Elle fabrique un petit cœur qui va un jour aimer, s’enflammer, s’extasier, s’émerveiller… Elle fabrique un système nerveux, un système digestif, un système sanguin, formidable, notre corps…

Elle fabrique de petites mains comme les vôtres, qui vont un jour se tendre pour serrer d’autres mains et faire la paix. Comment imaginer tout cela quand on regarde une femme enceinte ?

Comment imaginer la belle vie éternelle qui nous attend quand on regarde le monde d’aujourd’hui ? et pourtant c’est la même chose…

Il faut la Foi pour croire à tout cela. Vous êtes d’accord… il faut la Foi. Et ça, c’est ce que nous disait le prophète Jérémie dans la première lecture : « Il y a des jours où j’accomplirai cette promesse ». Si on a la Foi, on y croit.

Et le psaume disait aussi ça, différemment « Les chemins du Seigneur – ah ben c’est bien qu’on est en chemin, alors… – les chemins du Seigneur sont amour et vérité » Et ça viendra, entre les Hommes…

Et puis Jésus, dans l’Evangile, vous l’avez entendu, il dit « Veillez, priez… Parce qu’un jour vous obtiendrez la Vie. » Alors on a envie de lui dire : « Mais la vie on l’a déjà ! » Mais c’est d’une autre vie qu’il parle ! Celle où nous serons tous, tous tous très heureux ! Sans guerre, sans problèmes. C’est pour ça qu’il faut rester éveillés, qu’il faut prier.

Parce que, comme le disait ma grand-maman : « Non, c’était pas mieux avant. Ce sera encore beaucoup mieux après… »

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Vex, 28 novembre 2015, 18.30 (version enregistrée)

Les Haudères, 28 novembre 2015, 20.00

Hérémence, 29 novembre 2015, 9.00

Evolène, 29 novembre 2015, 10.30

Euseigne, 29 novembre 2015, 18.00

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Dans une version légèrement différente jadis :

Flanthey, 1er décembre 2012, 17.00

Lens, 2 décembre 2012, 9.30

Montana-Village, 2 décembre 2012, 11.00

 

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2 Responses

  1. Georges QUELLET

    Tellement belle, vraie et positive ton homélie, cher Vincent. Et bien accessible pour nous, qui aurons bientôt vécu autant d’années que ton adorable Grand-Maman, avec les mêmes constats. Merci pour cette bouffée d’optimisme, dans un climat mondial bien alarmiste.
    Georges et Pepita.

  2. Baehler marianne

    J’en ai les larmes qui me viennent….quel bonheur et merveille que ton homélie….comme une dentelle dans le soleil…Elle est légère et elle a du « poids » au sens biblique du terme.
    MERCI et amitiés.
    Marianne

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