Le nom de Dieu est miséricorde

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Image DR : Logo de l’année sainte (détail)

Homélie pour la messe de clôture

des « 24 h pour le Seigneur »

des paroisses d’Evolène, Hérémence et Vex

Exode 34,4–9  /  Psaume 16  /  Romains 12,4-9 / Jean 21, 14-19

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Chers Amis,

Nous venons de vivre 24 h. pour le Seigneur dans nos trois paroisses. Janvier, tu me disais hier soir : « ça passe tellement vite… » et pourtant si vous faites partie de celles et ceux qui ont adoré cette nuit une heure de temps à Vex vous vous êtes peut-être dit : « ça passe lentement, une heure, même en compagnie du Seigneur ! » Quand c’est entre 3 et 4 heures du matin, c’est long une heure !

A la fin de ce temps privilégié voulu par le pape François pour chacune des paroisses du monde pendant cette année sainte, je me dis que nous avons vécu une sorte de mission, une de ces missions paroissiales que nous faisons tous les deux-trois ans ici et là.

Allons-nous alors dresser une croix de mission, comme cela se faisait, quelque part dans la vallée pour marquer la fin de ce beau temps vécu ensemble ? (Enfin quand je dis « beau temps, je ne parle pas de la météo, vous m’avez compris…! Mais il fait beau dans les cœurs, Claude tu me le disais ce matin !)

Allons-nous dresser une croix ? Car une mission paroissiale n’a de sens que si on en fait quelque chose, si on repart avec un changement, une conversion, un signe.

Alors oui, je vous propose un signe. Je vous propose de tracer une croix. Mais pas comme vous le croyez. Une croix en « X », la croix qui illustre la mauvaise réponse sur un questionnaire. Celle qui dit : « ça, c’est faux. »

Et je vous propose de tracer cette croix en « X » dans nos esprits sur notre fausse conception de Dieu, sur ce Dieu de nos pères et de nos grands-pères qui avait le visage d’un juge impitoyable qui nous attendrait au contour pour vérifier toutes nos actions.

Tracez, traçons une croix sur cette fausse image de Dieu, chers Amis. Redisons-le une bonne fois pour toutes : ce Dieu juge et vengeur n’est plus d’actualité.

A moins que vous ne soyez djihadistes, là évidemment je ne dis pas…

Ne rigolez pas trop vite sur les djihadistes, il y a des djihadistes chrétiens, vous savez… Je suis sûr que vous en connaissez… Ils sont habillés tout en noir eux aussi, ils enferment les gens dans des règles religieuses eux aussi, ils excluent tous ceux qui ne pensent pas comme eux, eux aussi, et ils leur promettent l’enfer, eux aussi. Je suis sûr que vous en connaissez… pas si loin d’ici d’ailleurs.

Traçons une croix sur cette fausse conception de Dieu, chers Amis, définitivement. Car le nom de Dieu est miséricorde. C’est une des choses que nous avons découvertes, redécouvertes peut-être, ce week-end.

Ce n’est pas moi qui le dis d’ailleurs, c’est une phrase de Benoît XVI, le nom de Dieu est miséricorde, phrase reprise par le pape François ce printemps.

Le nom de Dieu est miséricorde, c’est sa carte d’identité, voilà ce que nous devons retenir de ces 24 h. pour le Seigneur.

Et tous les textes que j’ai choisis pour vous ce matin le redisaient bien.

L’Exode d’abord. Lorsque Moïse se demande qui est ce personnage qui dit s’appeler « Le Seigneur » et qui lui demande d’écrire sur des tablettes. Dieu se fait jour au travers de son vrai visage, et il dit à Moïse qu’il est – je vous re-cite ce passage – qu’il est « Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité, qui garde sa fidélité jusqu’à la millième génération, qui supporte nos fautes, nos transgressions nos péchés. »

Chers Amis, voilà le visage de Dieu pour Moïse. Au deuxième livre de nos Bibles, dans l’Ancien Testament. Quand des gens me disent qu’ils n’aiment pas lire l’Ancien Testament parce que Dieu n’y est que colère, jugement, violence, ça me fait bondir ! Lisez correctement l’Ancien Testament. On apprend quoi ? Qu’il est tendre, miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité, qu’il pardonne, et cela jusqu’à la millième génération.

Quand on sait dans la Bible que mille veut dire l’infini… Eh bien c’est ça, le visage de Dieu. Il pardonne à l’infini, et ça c’est déjà dans l’Ancien Testament, oui !

C’est ce visage-là de Dieu que nous devons retenir, ce visage dont parlait aussi le psaume – que nous n’avons pas changé, c’est le psaume du jour qui est prié dans toute l’Eglise ce matin – ce psaume qui nous parlait de ce visage que tant d’entre nous avons contemplé hier après-midi, cette nuit, ce matin dans la petite hostie consacrée.

Dieu pardonne à l’infini. Mais il sait bien que pour nous… pour nous c’est plus difficile. C’est difficile de pardonner.

C’est pour ça que j’ai choisi l’évangile de Jean, ce fameux moment où, au bord du lac, Jésus demande à Pierre qui l’a renié trois fois quelques heures plus tôt : « Pierre, m’aimes-tu ? »

Il veut lui pardonner, il veut lui enseigner le pardon. Mais ça va passer par un petit dialogue, et dans ce dialogue il y a un jeu de mots extraordinaire. Nous le savons, vous le savez, parce que je vous en ai déjà parlé, mais je vous le redis ce matin : en grec – la langue de l’Evangile – il y a deux verbes pour dire « aimer ». Alors qu’en français, très étonnamment – nous sommes une langue riche – mais en français il n’y a qu’un seul verbe pour dire qu’on aime le chocolat et qu’on aime son épouse… Alors que c’est pas tout à fait le même amour, excusez-moi… ! Il y en a qui adorent le chocolat mais qui aiment plus simplement leur épouse… à moins que ce soit l’inverse !

Dans toutes les autres langues, quasiment, il existe deux verbes en tout cas, bien différents :

l’un pour dire que l’on aime totalement, l’amour de charité, l’amour qui va jusqu’à donner sa vie pour l’autre;

– et puis un autre verbe pour dire qu’on aime, oui, qu’on aime bien, qu’on aime normalement comme on aime le chocolat, par exemple.

Dans l’épisode qu’on vient de ré-entendre, il y a ces deux verbes, mais on ne l’entend pas en français.

Le Christ attend de Pierre qu’il l’aime totalement, jusqu’à donner sa vie pour lui. Et il commence par le lui demander : « Pierre, m’aimes-tu vraiment, complètement, jusqu’à donner ta vie pour moi ? » Il utilise le verbe fort.

Seulement Pierre répond avec le verbe plus faible : « Seigneur, je t’aime bien… je t’aime un peu. »

Alors le Christ repose une deuxième fois la question avec le verbe fort : « Pierre, je te le redemande, m’aimes-tu vraiment, totalement, de tout ton cœur ? »

Et Pierre répond à nouveau avec le verbe faible : « Seigneur, tu le sais, je t’aime bien, je t’aime un peu, à ma manière, humainement. Je ne suis pas encore capable de donner ma vie pour toi. »

Et la troisième question est intéressante parce qu’alors le Christ descend au niveau de Pierre, et il utilise le verbe faible : « Pierre, est-ce que tu m’aimes un peu, au moins ? »

Et Pierre répond : « Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je ne t’aime que comme cela, qu’un peu, je t’aime bien. »

Le Christ descend jusqu’à notre niveau, il sait bien que nous ne sommes pas capables de l’aimer totalement, de donner toute notre vie pour lui, nous sommes des êtres humains.

Alors il descend à notre niveau en nous disant « Est-ce que vous m’aimez un peu, au moins ? Est-ce que vous m’aimez au point de prendre 24 heures – c’est rien dans une semaine, 24 heures – 24 heures pour moi ? »

Et vous lui avez répondu : « Seigneur, oui, nous t’aimons comme cela. 24 heures, on peut. Si tu nous avais demandé toute la semaine, ça aurait été sans doute difficile. »

Le Christ attend de nous un amour total, bien sûr. Mais il sait bien que nous sommes humains. Que nous avons notre amour à nous. Que l’amour est un chemin, le chemin de toute une vie, le travail de toute une vie. Il sait bien que nous sommes incapables d’aimer pour l’instant au point de nous donner entièrement à lui.

Alors il nous demande, au final, de l’aimer au moins un peu, au moins comme nous le pouvons. Et que notre amour soit joyeux, même s’il est imparfait.

C’est, pour terminer, ce à quoi Paul nous exhortait dans sa lettre aux Romains, la deuxième lecture, ce que nous devons retenir pour nous, pour notre action, après ces 24 heures.

Je vous relis les mots de Paul, et que cela soit pour nous gravés dans nos têtes, dans nos cœurs – moi le premier – pour agir désormais en enfants de Dieu. Je vous redis ce que Paul nous suggère à la fin de ces 24 heures :

« Frères et Soeurs, que votre amour soit sans hypocrisie. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au bien. Soyez unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres. Ne ralentissez pas votre élan – même dans la chorale ! – restez dans la ferveur de l’Evangile, servez le Seigneur, ayez la joie de l’espérance, tenez bon dans les épreuves, soyez assidus à la prière.

Partagez avec les fidèles qui sont dans le besoin, pratiquez l’hospitalité avec empressement.

Bénissez ceux qui vous persécutent ; souhaitez-leur du bien, et non pas du mal.

Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie,
pleurez avec ceux qui pleurent.

Soyez bien d’accord les uns avec les autres ;
n’ayez pas le goût des grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble.

Ne vous fiez pas à votre propre jugement.

Ne rendez à personne le mal pour le mal,
appliquez-vous à bien agir aux yeux de tous les hommes.

Autant que possible, pour ce qui dépend de vous, vivez en paix avec tous les hommes. »

Eh bien je ne sais pas pour vous, Frères et Soeurs, mais en ce qui me concerne j’ai du boulot !

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Hérémence, dimanche 6 novembre 2016, 10.00

(Messe de clôture des 24 heures pour le Seigneur)

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  1. Hermine Pralong

    Ces 24 h m’ont donné un nouvel élan, mais comme tu le dis si bien Vincent, j’ai encore beaucoup de boulot. Merci de nous avoir si bien soutenu et encourager. En plus magnifique organisation pour que toutes les paroisses puissent participer et par ton témoignage!

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