Le Shabbat de la balle brûlée

Classé dans : Homélies, Temps ordinaire | 1
Imprimer
Photo DR : Chevalliance

 

 

Homélie pour le 9e dimanche TO, année B

Deutéronome 5,12-15 / Psaume 80 / 2Corinthiens 4,6-11 / Marc 2,23 – 3,6

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

 

 

Chers Amis,

 

Dans les textes de ce matin, vous avez entendu un mot étranger pas moins de sept fois ! Le mot « Shabbat ». « Shabbat » qui, en hébreu signifie : « le repos ».

 

C’est le thème de notre journée, c’est le thème des textes d’aujourd’hui, c’est même le thème de chaque dimanche normalement.

 

Alors bien sûr tout le monde ne se repose pas le dimanche ! Si on se casse une jambe le dimanche, on est bien content de trouver du monde à l’hôpital pour nous soigner.

 

Mais, le dimanche, dans notre civilisation chrétienne, est le jour du repos. Ceux qui travaillent ce jour-là se reposent un autre jour, comme nous les prêtres nous reposons le lundi, en général.

 

Certains de nos politiciens reviennent très souvent à la charge concernant le dimanche. Les horaires des magasins qui devraient ouvrir ce jour-là selon eux, de plus en plus souvent, de plus en plus tard, et en tenant de moins en moins compte des fêtes de notre religion chrétienne.

 

A commencer par le dimanche.

 

La France, notre grand voisin qui se laïcise de plus en plus – ça devient quasiment une nouvelle religion, en France, la laïcité – la France revient régulièrement à la charge pour changer le nom des fêtes religieuses. Il y a même une loi qui a été déposée en son temps pour cela. Et même pour leur substituer des jours de fêtes laïques.

 

Déjà aujourd’hui, il y a des écoliers français qui n’ont pas du tout congé à Pâques. La France a divisé les écoles par zones. Il y a bien une zone qui a congé au moment de Pâques, mais pas les autres. Il y en a qui ont congé bien avant, d’autres plusieurs semaines après. On se fiche totalement que telle ou telle zone puisse fêter Pâques en famille.

 

Mais il n’y a pas besoin d’aller jusqu’en France, pour cela. A Genève, on a débaptisé un marché de Noël pour le nommer « Marché des Mondes », histoire de ne pas choquer les non-chrétiens, a-t-on dit.

 

Je ne suis pas certain que si vous vous rendez dans un pays non-chrétien, de quelque religion qu’il soit, on fasse grand cas de vos sensibilités religieuses et qu’on débaptise une de leurs fêtes en votre honneur.

 

Il serait bon qu’il n’y ait pas deux poids deux mesures parce qu’à force de marcher sur la tête, on risque d’avoir un jour quelques bobos…

 

Et si je vous parle de tout cela c’est justement parce que le thème des lectures de ce jour, c’est le « repos », le « Shabbat ». Et que le repos, c’est la première chose qui disparaît dans les endroits où l’on essaie d’éliminer Dieu.

 

La dernière fois, en Europe, qu’un gouvernement révolutionnaire a voulu changer complètement le calendrier – c’était la Révolution Française, pour faire un calendrier laïc – on a vu ce que ça a donné ! Il y avait trois périodes dans le mois – les semaines avaient été abolies – et il y avait trois périodes de dix jours, et le jour de repos était le 10e jour.

 

Eh bien faites le calcul : on avait perdu un dimanche par mois, voire même deux jours de repos par mois puisqu’il y a des mois où il y en a cinq. A la Révolution, il y en avait trois, c’est comme ça.

 

En URSS jadis, ou en Chine, pays qui ont voulu abolir la religion, la première chose qui a disparu c’est le jour de repos institué par la foi chrétienne auparavant.

 

Plus près de chez nous, en vue de la constituante valaisanne, certains voudraient supprimer les fêtes religieuses. On verra le résultat… Mais il me semble qu’on a la mémoire bien courte dans ce genre de débats.

 

Le repos, chers Amis, c’est un élément essentiel de notre vie. Et si Dieu l’a institué, ce n’est pas pour rien ! Si même lui a estimé en avoir besoin, ce n’est pas pour rien !

 

L’Homme ne peut pas travailler sans jamais se reposer, sans quoi la qualité de son travail baisse et sa force physique de même.

 

Même la terre a besoin de repos. Nous le savons bien, nous qui sommes ici des gens de la terre. La mise en jachère d’une terre – du moins le faisait-on jadis – lui offrait une année de repos. Et que se passait-il ensuite ? Eh bien, après une année de repos, la terre produisait d’autant plus et d’autant mieux parce qu’elle s’était reposée.

 

Aujourd’hui, si l’on écoute les grands groupes alimentaires qui font de la culture intensive, il ne faut surtout pas laisser une terre sans culture. Et que se passe-t-il ? La terre s’appauvrit, elle s’empoisonne, et on se demande pourquoi…

 

Bah elle ne se repose pas, c’est tout simple… La terre a besoin d’un temps de repos. Un jour on le comprendra à nouveau.

 

Si vous étiez comme moi, en étant enfants, vous jouiez peut-être à la « balle brûlée »… ce jeu sympathique où on devait courir tout autour du terrain pendant que la balle, elle, devait revenir vers le « brûleur ». Et si la balle arrivait dans les mains du brûleur avant que nous nous trouvions dans une maison – l’un des coins du terrain – eh bien nous étions… brûlés !

 

Dans le monde des adultes, c’est la même chose. « Brûlé » en anglais, ça se dit « Burn-out »…

 

Les adultes travaillent de plus en plus dans notre monde, en se disant :

–      Je vais y arriver ! Je peux encore faire un petit truc, je peux encore faire un petit truc de plus ! Je vais y arriver !

 

Exactement comme nous, les enfants, à l’époque, on courait d’un drapeau à l’autre en se disant :

–      Je peux encore arriver au suivant ! Je peux y arriver !

 

Et on était brûlés ! Quand on ne cassait pas la figure d’ailleurs, ce qui n’arrangeait pas les choses.

 

Dans le monde des adultes, c’est pareil. A croire qu’on peut arriver encore à en faire plus, on se brûle. On oublie de se reposer.

 

Les petits drapeaux, tout autour du terrain, étaient faits pour nous offrir des temps et des zones de repos. Et c’était pas pour rien… On devrait y penser plus souvent dans notre vie d’adulte.

 

Alors, Chers Amis, soignons nos temps de repos.

 

Dieu nous les a donnés à travers le Shabbat, parce qu’il sait très bien que nous évoluons dans des vases d’argiles – nos corps – c’est ce que nous disait Paul dans la deuxième lecture. Nos corps sont fragiles. Ils ont besoin qu’on en prenne soin.

 

Parce que Dieu sait aussi que nous avons besoin de jours de fêtes comme le rappelait le psaume.

 

Parce qu’il sait aussi que notre jour de repos est également là pour nous faire oublier le temps de l’esclavage, lorsque nous étions assujettis à des régimes qui nous oppressaient, comme le rappelait la première lecture.

 

Et parce qu’il sait que le repos est au service de l’homme, et non l’inverse, comme le rappelait notre Evangile.

 

Et d’ailleurs même à l’armée, Messieurs, lorsqu’on nous disait « Garde à Vous ! », l’ordre suivant était : « Repos ! »…

 

Alors soignons ces temps de repos, chérissons-les, protégeons-les des gouvernements – y compris les nôtres ! – qui voudraient les diminuer ou les supprimer. Rappelons à ces personnes que de tout temps l’Homme a besoin de temps de repos, puisque même Dieu s’est reposé, lui aussi.

 

___________________________________________

 

Vex, samedi 2 juin 2018, 18.30

Evolène, dimanche 3 juin 2018, 9.00 (version enregistrée)

Hérémence, dimanche 3 juin 2018, 10.30

Imprimer

  1. Pralong

    Très belle homélie Vincent, mais ne pas oublier que les mamans ne prenons guère de jours de repos.les moments de prières sont parfois les seuls temps des journées où l’on se repose (façon de parler), c’est notre rôle d’être toujours disponible pour nos enfants et notre mari. Quand enfin nous pouvons dire que nous prenons un jour de repos, nous sommes souvent bien avancées en âge et d’autres embûches apparaissent!!………….tu le sais. Mais je vais y réfléchir sérieusement et voir comment organiser ma vie de « demain » pour pouvoir dire c’est mon jour de Shabbat.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.