Le triangle, l’échelle et la Trinité

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Homélie pour la solennité de la SAINTE TRINITE, année A

Exode 34,4-9 / Cantique de Daniel / 2 Corinthiens 13,11-13 / Jean 3, 16-18

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Etes-vous superstitieux, Chers Amis ?

Ça n’est pas quelque chose qui va tellement avec la religion, normalement, la superstition.

Comme disait le célèbre humoriste Raymond Devos : « moi je ne suis pas superstitieux, ça porte malheur ! ».

Mais bon…

On a tous nos petites habitudes, nos petites marottes, nos petits rituels, les choses qu’on fait ou qu’on évite de faire.

De la culture du sud venue de mes grands-parents, je garde par exemple pour ma part l’interdiction absolue de poser un chapeau sur un lit… parce que ce sont les morts que l’on couche avec leur chapeau en main, ou encore l’interdiction absolue d’ouvrir un parapluie dans une maison (cette interdiction qui vient d’ailleurs tout simplement des vieux parapluies à armature qui provoquaient régulièrement des catastrophes sur les bibelots lorsqu’on les ouvrait à l’intérieur du salon… ça vient de là, tout simplement).

Bien sûr aussi, comme j’imagine plusieurs d’entre vous, il ne me viendrait pas à l’idée de croiser des couteaux sur une table ou encore de passer un couteau à l’un de mes invités en orientant la pointe vers lui, signes d’hostilité évidemment, il ne me viendrait pas non plus à l’idée de poser le pain à l’envers sur la table ou d’oublier d’y faire une croix avant de le rompre.

Mais l’origine de ces deux derniers rites liés au pain, la connaissez-vous ?

L’origine du pain que l’on ne pose pas à l’envers sur la table, ce n’est pas du tout une superstition, ça vient du bourreau. Lorsqu’il y avait des bourreaux, dans les villes et les villages, les jours d’exécution capitale ils recevaient gratuitement un pain chez le boulanger. Et pour que le bourreau puisse passer rapidement et reconnaître son pain le boulanger posait toujours ce pain à l’envers sur son comptoir. C’était le pain du bourreau. Et évidemment, c’est devenu un signe de mort puisque le bourreau venait pour une tâche funeste ce jour-là.

Et à l’époque, quand un paroissien venait à toucher le pain du bourreau, le boulanger y faisait tout de suite une croix au couteau pour exorciser ce geste. Ça vient de là, la croix derrière le pain, tout simplement.

Cette dernière pratique s’est généralisée à tout pain posé sur la table, y compris à l’endroit, on n’oublie pas en général d’y faire une croix en signe de simple bénédiction et non de superstition. On dit du bien de ce pain que Dieu nous offre, c’est cela le sens de la croix.

La superstition la plus connue, pourtant (ou l’une des plus connues peut-être) c’est encore le fait d’éviter de passer sous une échelle. Peut-être que c’est le cas de plusieurs d’entre vous. Eviter de passer sous une échelle.

Mais savez-vous que cette superstition-là est liée à la fête de ce week-end, à la Sainte Trinité ? Mais oui…

Pourquoi est-ce que ça a un lien avec Dieu ?

Eh bien tout simplement parce qu’une échelle posée contre un mur, ou une échelle double comme ceci, forme un triangle. Et si l’on passe à travers le triangle, cela signifie qu’on rejoint Dieu, donc que l’on meurt.

Cela vient de là, tout simplement. Parce que notre Dieu a très souvent été représenté par un triangle. Trois côtés, trois angles, trois personnes de la Trinité, Père, Fils, Esprit… Nous avons un Dieu en trois visages, un Dieu à trois faces, un Dieu-Triangle, qu’on le veuille ou non.

Ensuite bien sûr, plusieurs sectes, dont les Francs-Maçons, ont récupéré un bon paquet de nos symboles – dont le triangle auquel ils ont ajouté l’œil au milieu pour signifier la connaissance.

Cela n’a évidemment plus rien à voir alors avec notre Dieu-Trinité.

Notre Dieu-Trinité que nous fêtons ce week-end, un « Dieu-Triangle », est un Dieu dont les différentes lectures – trois comme par hasard, comme à chaque messe – nous dévoilent quelques aspects de ses trois visages, Père, Fils, et Esprit.

D’abord, lorsque nous écoutions la première lecture, nous avons entendu que notre Dieu est tendre et miséricordieux. Un Dieu tendre et miséricordieux, voilà un des visages du Père. Il est plein d’amour et lent à la colère, nous disait encore Moïse dans la première lecture.

Et puis l’Evangile nous rappelait – dans ce verset célèbre, Jean 3,16 – que Dieu qui a tellement aimé notre monde qu’il nous a donné son fils, non pas pour nous juger mais bien pour nous sauver.

Si vous ne devez apprendre qu’un seul verset de la Bible par cœur, Chers Amis, que ce soit celui-ci, s’il vous plaît : Jean 3,16. Dieu a envoyé son Fils non pas pour juger les gens mais pour les sauver.

Sortons-nous de la tête cette idée que nous avons un Dieu qui juge. Dieu a envoyé Jésus pour nous sauver, c’est marqué dans la Bible.

Nous, bêtement, dans les siècles passés, on a vu un Dieu-Juge. Un Dieu en trois personnes, certes, comme nous le disait la deuxième lecture, avec la grâce de Jésus, l’amour du Père, et la communion de l’Esprit. Un Dieu à trois faces. Mais un Dieu que l’on croyait Juge, un Dieu dont prétendument il fallait avoir peur.

Ce n’est pas ça, notre Dieu. C’est un Dieu d’Amour. Le pape François l’a redit ce midi à partir de ces mêmes textes. Nous avons un Dieu qui nous aime, tout simplement.

Mais nous, donc, dans les siècles passés, on a oublié ces aspects-là de Dieu pour en faire un Dieu-Juge qui nous faisait peur.

Et du coup le triangle, en signalisation routière, est devenu très naturellement le signal du… ? DANGER. Pour cette raison-là ! Comme contresigne on pouvait difficilement faire mieux !

Parce qu’on nous a dit jadis qu’il fallait avoir PEUR de Dieu, alors on a associé Dieu à la peur, et le triangle à la peur, aux dangers, aux problèmes.

Alors que le triangle sur la route ne signifie absolument pas le danger, Chers Amis, y compris le triangle de panne, d’ailleurs. Il dit simplement : « Attention, il y a là quelque chose à respecter. » Ce n’est pas pareil.

Il y a là quelque chose à respecter. Le triangle de panne dit : « Quelqu’un s’est arrêté au bord de la route, il faut respecter cette personne et ce véhicule. » Ce n’est pas ce véhicule qui va nous sauter contre, il n’est pas dangereux en soi. Il faut juste le respecter.

Dieu n’est pas dangereux, il est à respecter. Il faut ralentir, s’arrêter devant lui, le contempler.

Avant de passer sous une échelle, il vaut mieux ralentir, regarder si le pot de peinture ne s’apprête pas à nous tomber dessus, et faire attention à ne pas accrocher l’échelle avec notre sac pour en faire tomber le peintre, cette fois-ci.

Un panneau triangle avec des enfants dessus, ça veut dire quoi ? Que ces enfants sont dangereux ? Qu’il faudrait avoir PEUR de ces enfants ? Absolument pas !

Cela veut dire au contraire qu’il nous faut respecter ces enfants, qu’il faut ralentir, exactement comme devant Dieu.

Même chose pour la plupart des panneaux en triangle, vous pouvez faire le même exercice avec tous les autres. Le virage ne va pas nous sauter contre, il s’agit juste de ralentir à l’approche de ce virage, de le respecter, tout simplement.

Et vous savez, Chers Amis, la plupart de nos superstitions fonctionnaient comme cela, c’était un respect à la base.

On respectait le bourreau parce que personne n’aurait voulu faire son travail.

On respectait l’invité qui arrivait à notre table et on ne lui posait pas le couteau en avant.

On respectait le peintre qui était sur son échelle et on n’allait pas passer en-dessous pour cette raison-là, au départ.

On respectait le salon de la personne chez qui on arrivait avec notre parapluie tout mouillé et on n’allait pas le tremper en refermant notre parapluie dedans.

C’étaient simplement des signes de respect.

Il nous faut chasser nos peurs, chers Amis, particulièrement nos peurs de Dieu… retrouver simplement le respect, c’est cela que nous lui devons.

Particulièrement le respect de notre Dieu-Trinité, notre Dieu à trois faces.

Respecter, ce n’est pas trembler de peur. C’est ralentir nos vies, prendre le temps pour lui, exactement ce que vous avez fait en venant ici ce soir.

Et en cette fête de la Trinité, je souhaite que nous nous rappelions, comme disait le pape François, que nous avons un Dieu certes en trois personnes mais qui nous aime. Père-Fils-Saint Esprit nous aiment. Ils ne sont pas là pour nous juger, ils sont là pour nous sauver.

Amen.

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Bex, samedi 6 juin 2020, 18.00

La Luette, dimanche 7 juin 2020, 18.30 (version enregistrée)

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2 Responses

  1. Philippe Boehler

    Belle homélie ( sermon ?)….En fouillant sur le web, on a bien confirmation de ce que tu rappelles…et qui a été un peu *piqué* par d’autres…

    Voici le lien:
    <http://www.aqbv.org/triangles6.html
    Conclusion…. Eviter les pannes pour ne pas devoir sortir le triangle… 😉

  2. Philippe Boehler

    Le triangle est une figure géométrique fondamentale, le symbole spirituel de la Trinité originelle et essentielle de la Divinité. Trois personnes travaillant en groupe forment trois points focaux réunis à travers lesquels peut circuler l’énergie spirituelle.

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