Mêle-toi de SES casseroles

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Homélie pour le 23e dimanche TO, année A

Ezéchiel 33,7-9 / Psaume 94 / Romains 13,8-10 / Matthieu 18,15-20

Chers Amis,

Vous êtes chez vous avec votre enfant, ou votre petit-fils ou petite-fille, ou votre neveu, nièce, bref, un enfant, prenez celui que vous voudrez…

Vous connaissez cette scène par coeur. Une casserole chauffe sur une plaque. Le manche de la casserole dépasse, et l’enfant approche la main…

Et bien sûr vous vous précipitez… Attention !

Il ne vous viendrait pas un seul instant à l’idée de dire : « Qu’il se brûle, ça lui apprendra la vie ! » Ce serait sadique. Même si c’est vrai que c’est souvent par nos erreurs qu’on apprend la vie.

Pourtant, quand l’enfant est devenu adulte, qu’il est marié, qu’il vit sa vie, notre attitude change.

Votre fils, votre fille, devenu adulte, fait une erreur. Et vous, qu’est-ce que vous dites ?

C’est pas mes affaires.

Je veux pas me mêler de sa vie.

C’est son problème.

D’ailleurs c’est quelque chose qu’on nous apprend, vous l’avez déjà entendu depuis tout petit cette phrase :

Mêle-toi de tes affaires !

Occupe-toi de ce qui te regarde !

Du coup, peu à peu, et notamment en Suisse dans nos villages, on se fabrique une société qui SURTOUT ne va pas se mêler des affaires des autres.

C’est leur problème !

Par contre on va en parler, dans leur dos de préférence, au bistrot par exemple :

Vous savez pas ce qu’il a fait ? Mais je vous assuuuuure ! Mais des chôôôôôses pareilles !

On est assez forts pour commenter les erreurs des autres, mais on ne va surtout pas aller le leur dire en face. C’est leur problème !

Faut avouer aussi que souvent, quand on va dire en face à quelqu’un qu’il a fait une erreur, on s’en prend plein la figure !

Entendons-nous, il ne s’agit pas de dénoncer toutes les erreurs des autres, de devenir pointilleux, scrupuleux… parce que là, en général ce sont nos propres erreurs que l’on ne voit plus.

Mais aller trouver l’autre, seul à seul, pour lui dire :

Je t’aime bien, je ne te veux aucun mal, mais je crois que là, tu as fait une erreur.

L’autre vous sera reconnaissant, tôt ou tard. Vous aurez gagné un grand ami. Parce que les vrais amis ne sont pas ceux qui vous flattent toujours, qui vous disent toujours que c’est génial ce que vous avez fait. Celui qui ose vous dire que vous avez fait une erreur, celui-là est un vrai ami. Et c’est exactement ce que Jésus nous propose dans l’Evangile d’aujourd’hui.

« Si tu penses que ton frère commet une erreur, nous dit le Christ, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute. S’il t’écoute tu auras gagné ton frère. »

Merveilleuse psychologie du Christ : ne lui fais pas une remontrance devant tout le monde, va le trouver seul à seul. Nous serions bien inspirés de suivre cet avis.

Le problème c’est que les gens ne nous reconnaissent même plus ce droit légitime. Mêlez-vous de ce qui vous regarde, je ferai pareil, et tout ira bien.

Eh bien non, tout n’ira pas bien. Et on ne construira pas une communauté chrétienne ainsi, à fortiori pas non plus le Royaume de Dieu. Si chacun s’occupe uniquement de ses propres affaires, que devient le bien commun ? Personne ne s’en occupe plus. Et cela nous pend au nez, dans nos communautés.

« S’il ne t’écoute pas, continue le Christ, prends avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins ».

Mêle-toi des affaires des autres, eh oui. Pas comme un voyeur, mais comme un guetteur.

C’est la première lecture qui nous le disait. Le prophète Ezékiel nous invitait à devenir des guetteurs. Un guetteur ne va pas regarder tout ce qui se passe chez le voisin. Il guette, c’est à dire qu’il regarde au loin. Il veille au grain. Il se méfie de la casserole qui dépasse de la plaque.

Et c’est par amour de son prochain, comme le disait la deuxième lecture, qu’il va aller trouver celui qui risque de faire une erreur.

Et si même avec un ou deux autres, ou avec la communauté, cette personne refuse encore d’écouter ?

« Alors considère-le comme un païen et un publicain. » dit Jésus.

La réponse nous surprend, au premier abord. Nous, quand on lit cela, on se dit que Jésus nous demande de laisser de côté cette personne. Considère-le comme un païen, ok, je ne m’occupe plus de lui.

Mais dites-moi… qu’a fait Jésus avec les païens et les publicains ? Il s’en est occupé justement ! On le lui a assez reproché, de manger avec eux, de passer du temps avec eux ! Et c’est aussi ce que nous demande le pape François : Allez chercher les chrétiens des périphéries, et même les autres, tous ceux qui sont en marge.

« Considère-le comme un païen », dans la bouche du Christ, ça veut dire ceci : n’abandonne pas cette personne, surtout pas. Peut-être qu’elle était trop en marge pour pouvoir entendre, accepter ce que tu étais venu lui dire. La prochaine fois, mets des gants, utilise d’autres mots, considère cette personne comme quelqu’un dont il faut t’occuper, mais en la rejoignant là où elle est, en lui parlant avec les mots qu’elle est capable d’entendre.

Et puis même si cette personne a coupé le lien qui vous reliait parce qu’elle n’a pas accepté ce que tu lui as dit, eh bien prends-la dans ta prière, continue de la confier à Dieu. Et prie pour elle avec d’autres amis, si deux d’entre vous se mettent d’accord pour demander quelque chose à mon Père, dit encore Jésus, ils l’obtiendront. C’est ça, l’attitude que le Christ nous propose.

Tentation classique de nos communautés : celui qui ne pense pas comme nous, on va pas aller faire des efforts pour lui. Jésus, lui, nous dit : au contraire, aimez-les, ces gens qui ne pensent pas comme vous. Aimez-les, ces personnes à qui vous avez essayé d’ouvrir les yeux et qui n’ont pas voulu vous écouter. Aimez-les, et redoublez d’efforts pour conserver ces liens-là.

Priez pour ces personnes aussi.

Aimez-les parce que vous êtes aussi pécheurs qu’elles, et peut-être davantage.

Aimez-les parce que Dieu les aime tout autant qu’il vous aime. Et qu’il veut les sauver tout autant que vous. Aimez-les parce que c’est ainsi que vous ferez advenir le Royaume de Dieu.

Alors… mêlez-vous de vos affaires ? Oui, d’abord. Mais de celles de vos frères et soeurs aussi. Parce que c’est ainsi que nous construirons ensemble le Royaume de Dieu.

Et bien sûr, comme toute charité bien ordonnée commence par soi-même : j’attends de vous, lorsque je fais une erreur, que l’on vienne me le dire, bien sûr !

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Vex, samedi 6 septembre 2014, 19.00

Evolène, dimanche 7 septembre 2014, 9.00

Hérémence, dimanche 7 septembre 2014, 10.30

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