Noël, internet, et les enfants

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Homélie pour la Nuit de Noël

Isaïe 9,1-6 / Psaume 95 / Tite 2, 11-14 / Luc 2,1-14

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

J’ai tapé Dieu tout à l’heure.

Non, sur mon clavier d’ordinateur, hein ! Qu’alliez-vous imaginer !?

J’ai tapé le mot « Dieu » sur mon ordinateur, pour voir ce que ça me donnerait…

Le principal moteur de recherche m’indique qu’il y a environ 209 millions de pages qui parlent de Dieu, sur internet… c’est beau, hein ? 209 millions… magnifique !

Et la première d’entre elles qui m’était proposée, c’est la définition de Dieu sur cette encyclopédie en ligne qu’est Wikipedia.

Je vous en donne la première phrase… si vous comprenez quelque chose, vous me faites signe !

« Dieu désigne un être ou force suprême structurant l’univers ; il s’agit selon les croyances soit d’une personne, soit d’un concept philosophique ou religieux ; Principe fondateur dans les religions monothéistes, Dieu est l’être suprême, unique, transcendant, universel, créateur de toutes choses, doté d’une perfection absolue, constituant le principe de salut pour l’humanité et qui se révèle dans le déroulement de l’histoire ; comme entité philosophique, Dieu est le principe d’explication et d’unité de l’univers.

Et moi je croyais que Dieu était « Amour »… mais c’est beaucoup plus compliqué que ce que je croyais ! Vous avez compris, vous ? Non ? A cette heure-là, c’est normal.

Alors bien sûr, comme théologien je pourrais passer une heure à vous expliquer ces phrases compliquées, que des gens très savants ont élaborées et qui sont très justes, de fait.

Mais ce n’est pas ça, notre Dieu, chers Amis… Ce n’est pas ça ! Encore moins ce soir ! Ce n’est pas une série de concepts tous plus incompréhensibles les uns que les autres !

Regardez… [montrant la crèche] Il est là, Dieu… c’est un petit bébé, c’est un nouveau-né… c’est un enfant.

D’ailleurs Jésus, un peu plus grand, nous dira qu’il faut redevenir comme des enfants si nous voulons entrer dans le Royaume des Cieux. Comme s’il voulait nous dire que pour comprendre Dieu, il faut un regard d’enfant.

Alors j’ai demandé à mon ordinateur ce que les enfants disent de Dieu. Et là, là… je trouve les réponses plus intéressantes. Alors je vous en donne quelques-unes :

  • Cher Dieu, dit Jérémie, je suis canadien ; et toi, tu viens de quel pays ?
  • Cher Dieu, dit Nanette, ça doit être très difficile d’aimer tout le monde. On n’est que quatre dans ma famille, et moi je n’y arrive déjà pas.
  • Cher Dieu, dit Michel, Si tu me regardes bien à l’église, dimanche prochain, je te montrerai mes nouvelles chaussures que j’ai reçues à Noël !
  • Cher Dieu, dit Dominique, à l’école, on m’a dit que c’était Edison qui avait inventé la lumière. Mais au catéchisme, ils m’ont dit que c’était toi. Je parie qu’Edison t’a piqué ton idée.

Et cette dernière que je trouve magnifique :

  • Cher Dieu, s’il te plaît, ne me fais jamais grandir. Parce qu’on m’a dit aujourd’hui que ta maison appartient aux enfants ! »

Voyez, les enfants parlent tellement bien de Dieu… beaucoup mieux que les savants.

Je connais une personne qui, quand elle était petite, se mettait toujours à la fenêtre pendant les orages et elle souriait vers le ciel. Parce qu’elle pensait qu’à chaque éclair, Dieu prenait une photo, et donc elle voulait être sur la photo pour qu’il n’oublie jamais son visage, disait-elle…

Un autre petit enfant demandait comment Dieu tient au ciel. «Est-ce qu’il est collé ? »

Alors un autre enfant lui a dit : « Mais non. Quand tu dis ‘Notre Père qui es aux Cieux’, tu n’as pas compris ?? Le ciel, ça commence juste-là, là… juste au-dessus du sol, c’est déjà le ciel. Toi, il n’y a que tes pieds qui touchent le sol, tout le reste est dans le ciel. Alors quand on dit ‘Notre Père qui es aux Cieux’, c’est qu’il est là, autour de nous. »

Vous voyez, je ne peux plus prier le « Notre Père » sans penser au raisonnement magnifique de cet enfant.

La logique des enfants, chers Amis, c’est magnifique ! Et ça nous apprend – je le disais – beaucoup plus de choses sur Dieu que les théologiens et leurs phrases compliquées.

Les adultes compliquent tout. Ils se prennent parfois pour Dieu, d’ailleurs… Alors que Dieu, à Noël, se prend pour un enfant… Il inverse les choses.

Il nous invite à renverser notre regard, au moment de Noël. A regarder le monde à travers des yeux d’un enfant.

Et les lectures que nous avons écoutées ce soir utilisent des mots que les enfants comprennent très bien. Il y avait des mots tout simples, là-dedans.

Le prophète Isaïe, dans la première lecture, parlait d’une grande lumière, de joie, de bâton de guerre cassé, de matériel de guerre brûlé pour qu’il ne serve plus jamais.

Si seulement les adultes pouvaient entendre ces mots… Il y a encore tant de bâtons de guerre qui ne sont pas cassés !

Le psaume, lui, commençait par dire : « Chantez au Seigneur un chant nouveau ! » Vous n’avez jamais entendu un enfant qui vous dit: « Allez, tu m’apprends une nouvelle chanson ? » C’est tout à fait un vocabulaire que les enfants comprennent, ça ! Le psaume parlait aussi de joie, de fête, de danse… Voilà des mots que les enfants apprécient… et les grands enfants que nous sommes aussi, d’ailleurs !

Dans un camp biblique auquel j’ai participé jadis, un enfant avait recopié le texte du Notre Père, mais d’oreille vous savez… alors évidemment il y avait quelques fautes d’orthographe ! Et la plus belle d’entre elles… il avait écrit : « Que ta volonté soit FETE… » F-Ê-T-E… ça c’est magnifique ! « Que ta volonté soit FETE… » Et quand on lui a demandé pourquoi, il nous a dit : « Mais… Dieu veut qu’on fasse la fête ! » Et il avait bien raison.

Cet enfant a probablement bien mieux compris Dieu que bien des théologiens que je connais.

Et il a bien mieux compris Noël que bien des législateurs que nous connaissons aujourd’hui, ceux qui ont décrété qu’on n’avait plus le droit de chanter à Noël, cette année… Faudra peut-être qu’ils rendent des comptes aux enfants de 2020, plus tard, ceux-là… qu’ils nous expliquent comment on en est arrivé à l’absurdité de décréter qu’on n’avait plus le droit de chanter le soir de Noël…

L’absurdité a de beaux jours devant elle, vous savez ! Les enfants, eux, rient quand ils rencontrent l’absurdité sur leur chemin, et c’est une réaction très saine.

Dans la deuxième lecture, Paul nous parlait aussi avec des mots simples. Il nous parlait de vie, de justice, de bonheur, de sauveur…

Regardez les enfants jouer au Sauveur, quand ils jouent à « Superman ».

Un jour, un enfant m’a dit : « Jésus c’est comme Superman. Mais en vrai. » Eh oui, c’est ça, c’est un Sauveur ! Cet enfant avait parfaitement compris le mystère de Noël…

Enfin, l’Evangile que nous avons ré-entendu racontait encore une fois cette histoire que nous connaissons par cœur et que les enfants ne se lassent jamais d’entendre, pour peu qu’on la leur raconte ! …Joseph, Marie, le recensement, la mangeoire parce qu’il n’y avait pas de place ailleurs, les bergers, la grande lumière, les anges, l’étoile, la crèche…

Regardez un enfant devant une crèche. Et écoutez ce qu’il a à dire, si vous lui donnez la parole… vous serez surpris.

Il y a quelques années en arrière, devant une crèche comme celle-ci, à côté de moi, il y avait un adulte et une petite fille. Et cet adulte essayait d’expliquer à la petite fille ce qu’elle avait sous les yeux. Comme cet adulte est une grande personne, comme disait le Petit Prince, eh bien il a tout compliqué, il a tout embrouillé…

Il lui disait : « Tu sais, c’est une crèche, une crèche c’est une petite maison… mais c’est pas vraiment la même que celle de Bethléem parce que c’était il y a longtemps, c’était il y a deux mille ans… d’abord elle n’était certainement pas aussi petite que celle-là… mais elle n’était quand même pas très grande… et puis ça, c’est une crèche moderne, à l’époque c’était sûrement très différent… et puis bon, il y a des personnages, mais eux, ils ne sont pas vivants… alors que les vrais personnages de la vraie crèche, ils étaient vivants… enfin ceux-là ce n’est pas tout à fait les vrais mais c’est comme si c’était les vrais, enfin ils représentent les vrais… c’est symbolique… ah oui, symbolique c’est difficile comme mot, aussi… »

…En deux minutes, il avait tout embrouillé !

Alors la petite fille a eu pitié de lui.

Elle l’a regardé avec un grand sourire… et elle lui a dit : « Mais bien sûr que si, c’est la vraie crèche ! Parce que Dieu, tu sais, il a sa maison partout. Alors celle-là aussi, c’est sa vraie maison. »

Il y a eu un beau silence… et puis, moi, j’ai souri à côté.

Dieu, à Noël, ce n’est pas une définition d’adulte, d’internet ou de Wikipedia. Ce n’est pas un concept théologique. C’est un enfant.

Aide-nous, Seigneur, à redevenir comme les enfants pour mieux te comprendre, pour mieux t’aimer tout simplement, pour mieux nous émerveiller devant le mystère de Noël, devant ta présence parmi nous, ce soir encore !

Amen.

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Aigle, 24 décembre 2020, 19.00 et 22.00

…dans une version sensiblement différente jadis :

Evolène, 24 décembre 2017, 24.00

Hérémence, 24 décembre 2015, 24.00

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