Nos vocations…

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Homélie pour le 15e dimanche du temps ordinaire, année B

Amos 7,12-15 / Psaume 84 / Ephésiens 1,3-14 / Marc 6,7-13

 

Chers Amis,

Les textes de ce dimanche semblent nous parler de choses très diverses.

Amos, d’abord, simple agriculteur devenu prophète, 8 siècles avant le Christ.

Paul, ensuite, qui rappelle aux Ephésiens le salut universel.

L’Evangile de Marc, enfin, qui relate l’envoi des premiers disciples par Jésus.

Pourtant ces trois textes qui semblent totalement divergents nous parlent de la même chose. Et cette chose est résumée dans la toute première phrase du psaume d’aujourd’hui : « J’écoute… que dira le Seigneur Dieu ? »

Oui… ces trois textes nous parlent de notre façon d’écouter ce que Dieu a à nous dire, son appel pour chacune et chacun de nous.

Paul, dans la seconde lecture, nous rappelle que cet appel est pour tous.

Et l’histoire d’Amos – la première lecture – enfonce ce clou-là. Car Amos était un simple agriculteur qui ne savait pas parler, n’avait aucune éducation. C’est lui que Dieu va choisir, il y a 2800 ans maintenant, pour confondre ceux qui se croyaient sages, les prêtres de l’époque.

Amos va tellement les mettre mal à l’aise qu’il en sera contraint de partir de chez lui. C’est l’épisode que nous avons entendu.

Cela nous confirme que Dieu appelle tout types d’individus. Ceux que l’on dit « cultivés » mais aussi ceux que l’on dit « cultivateurs », par exemple.

Paul, dans sa lettre aux Ephésiens, nous rappelle aussi que Dieu nous a choisis, chacune et chacun, bien avant notre naissance, dès avant la création du monde. Il nous a d’avance destinés à être ses fils adoptifs. Et sa grâce est inépuisable sur nous, quelles que soient nos erreurs. Sacrée bonne nouvelle, non ?

Une fois que nous nous sommes rappelés que Dieu nous appelle toutes et tous, voyons ce qu’il attend de nous.

Pour cela il faut aller regarder dans l’Evangile de Marc.

Nous avons entendu cette étonnante scène dans laquelle Jésus envoie ses disciples en leur demandant de ne rien emporter pour la route, ni pain, ni argent, ni vêtement de rechange.

J’ai croisé l’autre jour au Grand St Bernard un ami qui va à pied à Rome. Je regardais son équipement… Heureusement, ai-je dit ensuite à un chanoine, heureusement qu’il n’a pas écouté Jésus ! Il a du matériel !

Ah bon ? m’a rétorqué le chanoine. Jésus ne demande pas de ne rien prendre, pourtant. Il compte simplement sur l’éthique des gens qui reçoivent les voyageurs. Et c’est peut-être ce qu’il veut nous apprendre à nous, religieux.

Alors je lui dis : « Attends, il y a quand même ce passage de Marc où Jésus envoie ses Apôtres sans rien ! »

Et le chanoine de me répondre : « Jésus indique de ne pas se soucier de pain – or ici à l’hospice nous nourrissons tout pèlerin qui arrive. Jésus indique de ne pas prendre d’argent – or ici à l’hospice chacun est logé, quels que soient ses moyens. Jésus indique de ne pas prendre de vêtement de rechange, or ici à l’hospice chacun peut faire sa lessive en vue du lendemain, pour reprendre la route. Je crois que Jésus indique davantage à celui qui reçoit le pèlerin qu’au pèlerin lui-même… »

Ce chanoine m’a fait beaucoup réfléchir. Oui, bien sûr, ce texte doit aussi être vu à l’envers, comme une instruction à celles et ceux qui vont recevoir ses disciples. C’est à dire comme une instruction pour nous.

On retrouve cela dans la fameuse allégorie du jugement dernier, dans l’évangile de Matthieu : j’étais nu, et vous m’avez habillé, j’avais faim et vous m’avez donné à manger, soif et vous m’avez donné à boire…

Parce qu’à chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.

En repartant du St Bernard, j’ai regardé différemment la devise des chanoines, inscrite sur le mur : « Ici le Christ est adoré et nourri ».

Il y a deux vocations chrétiennes dans ce texte : la vocation d’Apôtre et la vocation de ceux qui reçoivent les Apôtres chez eux, dans leur ville ou village.

Les prêtres, diacres, assistants pastoraux, sont les Apôtres d’aujourd’hui. Ils bougent, vont de village en village, de ville en ville, ils ne sont plus fixés comme jadis dans un même lieu, à l’ombre d’un même clocher.

Ils ne peuvent plus s’encombrer d’objets inutiles ou vains. Leur mission est un chemin qu’ils arpentent chaque jour. Et pour ma part, je vais bien m’en rendre compte dans quelques semaines, puisque ce sont 18 clochers que je m’apprête à desservir, avec deux autres confrères.

Le Christ demande d’ailleurs que ses Apôtres ne soient pas seuls sur ce chemin, et rien de pire qu’un prêtre seul, aujourd’hui. Et on peut être seul au sein d’une équipe, je crois pouvoir dire que je sais de quoi je parle.

Vous, paroissiennes et paroissiens, vous êtes ceux qui accueillent ces Apôtres modernes. Votre vocation est de nourrir, d’habiller, d’accueillir.

Vous me direz : mais les prêtres ont tout ce qu’il faut. Oui, si l’on prend « nourrir », « accueillir », et « habiller » au sens premier.

Mais on peut avoir faim de dialogue. On peut être nu d’amitiés. On peut se sentir étranger même en habitant une cure. L’affamé n’est pas seulement celui qui n’a rien à manger, le nu n’est pas seulement celui qui n’a pas d’habits, l’étranger n’est pas seulement celui qui vient d’un autre pays.

Voilà, je crois, de quoi réfléchir à nos vocations réciproques.

Revenons enfin au prophète Amos qui complète ces conseils. Oui, il faut accueillir, nourrir, habiller.

Mais cela ne suffit pas.

Il faut aussi s’élever contre l’injustice lorsque nous la rencontrons. Dieu nous appelle à cela. Cela devrait être la vocation de chaque chrétien.

Et si vous relisez le passage d’Amos que nous avons entendu aujourd’hui, vous découvrez qu’Amos s’élève contre un prêtre. Contre une autorité inattaquable de l’époque.

Cela vient aussi nous dire que, quelle que soit la position du coupable de l’injustice, nous devons nous élever contre lui. Nous devons lui faire entendre que ce qu’il a fait n’est pas bien.

Et s’il n’entend pas, il nous reste à secouer la poussière de nos sandales, et à partir plus loin, ailleurs, écouter et annoncer encore et toujours la bonne nouvelle du Royaume.

Amen.

Monthey (Closillon), samedi 14 juillet 2012; Monthey, dimanche 15 juillet 2012; Les Giettes, dimanche 15 juillet 2012

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  1. Philippe Boehler

    Bonsoir cher ami,
    Permets-moi de te remercier pour la qualité de tes sermons ( homélies ?) que tu proposes aux paroissiens, et que tu prends soin de publier sur ton site Internet.
    J’ai entendu beaucoup de sermons au cours des mes dizaines années de pratique religieuse….Je dois dire que les tiens sont parmi les meilleurs, tant par leur contenu,que par ta diction parfaire,. Ils ne sont ni trop longs.ni trop courts.
    Tu vas devenir……….. un Bossuet du 21 ème siècle…Continue ta mission. Elle est porteuse d’ Espoir, de Foi profonde …. Merci!

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