Oui à un Dieu « Couchepinesque »

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Photo-montage DR : Pascal Couchepin, ancien conseiller fédéral (photo RTS), et la Création par Michel-Ange (détail)

 

Homélie pour la solennité de la SAINTE TRINITE, A

Exode 34,4-9 / Cantique Daniel 3 / 2Corinthiens 13,11-13 / Jean 3, 16-18

 

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

 

Chers Amis,

 

Régulièrement, après une homélie ou après une discussion même au bistrot, les gens me disent : « Ah mais ça… ça vous savez, ça c’est nouveau pour nous, on ne nous avait jamais dit ça, avant… »

 

Alors c’est vrai que l’Eglise des siècles passés avait une façon de prêcher qui était souvent basée sur la peur… la peur de Dieu. A plusieurs d’entre vous, on a fait peur, il faut le reconnaître. Bien des prédicateurs agitaient devant nous l’image de l’enfer comme un épouvantail, et l’image de Dieu comme celle d’un Juge terrifiant et impitoyable.

 

Mais d’où vient, chers Amis, que nos ancêtres, et peut-être encore certains d’entre nous, aient peur de Dieu à ce point-là ? Alors que nous avons tout sous les yeux pour nous prouver le contraire… Tout ! C’est là, dans ce livre… Evidemment il faut le lire, ça aide !

 

Que dit la Bible, dans les textes que nous avons ré-entendus aujourd’hui, où nous fêtons justement son identité, à ce Dieu-Trinité ? Que dit la Bible à propos de notre Dieu ? Parle-t-elle d’un Dieu qui juge ? D’un Dieu dont il faudrait avoir peur ? D’un Dieu qui serait impitoyable ? D’un Dieu qui nous soumettrait ?

 

Le mot « islam » en arabe, c’est la racine de la « soumission »… Eh bien non, ce n’est pas notre Dieu, celui qui soumet.

 

Reprenons ensemble quelques éléments des lectures que nous avons entendues.

 

D’abord l’Evangile que nous venons de ré-entendre. Dans cette très belle page de St Jean, Jésus nous rappelle que Dieu n’est pas là pour nous juger.

 

…Laissez-moi vous le redire : Dieu n’est pas là pour nous juger !

 

Ce n’est pas une invention de prédicateur, c’est dans l’Evangile. D’aujourd’hui ! Suffit de lire…

 

Non seulement il n’est pas là pour nous juger mais – je vous redis la phrase : « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. » C’est assez clair, me semble-t-il, si on comprend le français… !

 

Dieu ne veut pas nous juger, Dieu veut nous sauver ! C’est pas tout à fait la même idée, quand même !

 

Et puis, si nous revenons encore un peu en arrière dans les autres textes que nous avions aujourd’hui, nous avions la deuxième lecture.

 

Ah… la deuxième lecture ! Combien de fois ai-je entendu certains confrères de mon enfance – ou certains confrères actuels aussi d’ailleurs – dire en sacristie : « Ah, non, aujourd’hui on ne prend pas la deuxième lecture… »

 

Au point que plusieurs de nos lecteurs me demandent régulièrement si on prend la deuxième lecture, c’est resté comme un réflexe…

 

Quel dommage, chers Amis !

 

Et quel manque de respect vis-à-vis de vous, au passage ! Grâce à Vatican II, depuis 50 ans, on peut entendre chaque jour la Bible, à la messe, dans notre langue. D’où l’intérêt de ne pas supprimer une lecture : puisque l’Eglise nous propose justement d’écouter tel et tel texte, c’est certainement une chance pour nous que de pouvoir les entendre. C’est certainement que ces textes ont quelque chose à nous dire, à nous enseigner !

 

De quel droit vous priver de cela ?

 

Pourquoi tant de paroisses suppriment-elles la deuxième lecture ? Elles estiment peut-être – je ne sais pas ? – qu’elle est trop difficile pour vous ? Ou que ça va rallonger la messe… 2 minutes de plus, mon Dieu mon Dieu ! Alors qu’on passe en moyenne 10 ou 12 heures devant nos télévisions chaque semaine, peut-être que 2 minutes de plus avec Dieu, pour écouter sa Parole, ça vaut le coup, non ?

 

Ou alors c’est que peut-être cette deuxième lecture parlerait moins bien de Dieu, justement ? Eh bien allons voir…

 

La deuxième lecture d’aujourd’hui était tirée de la deuxième lettre de Paul aux Corinthiens.

 

Et on y lisait – vous l’avez également entendu – que notre Seigneur est un Dieu d’Amour et de Paix…

 

…D’Amour et de Paix…

 

…et que tout cela devrait amener la Joie dans nos cœurs. Il me semble que ça aurait été dommage de la supprimer, celle-là !

 

Qu’avons-nous jusqu’ici, par ces textes ? Un Dieu qui veut nous sauver plutôt que nous juger, un Dieu d’amour, de vérité, de paix, qui amène la joie… Excusez-moi mais jusqu’ici on est assez loin d’un Dieu colérique et juge, vous ne trouvez pas ?

 

Alors c’est à ce moment-là, en général, que des personnes viennent nous dire : « Oui, mais il y a le Dieu de l’ANCIEN Testament ! C’est avec ça qu’on nous a fait peur, vous savez, Monsieur le Curé ! D’ailleurs, vous savez, moi je lis la Bible, hein ! Mais pas l’Ancien Testament, ah non, avec ce Dieu épouvantable qui nous juge ! »

 

Eh bien je réponds toujours à ces personnes que c’est doublement dommage.

 

C’est dommage, premièrement, parce que l’Ancien Testament représente les trois-quarts de nos Bibles. Si vous ne lisez qu’un quart du livre, je ne suis pas certain que vous puissiez prétendre lire la Bible.

 

C’est comme si vous preniez un roman policier de 70 chapitres, et que vous ne lisiez que les 20 derniers. Pas sûr que vous allez comprendre l’histoire, hein… C’est un petit peu dommage…

 

Mais je leur dis que c’est dommage aussi et surtout parce que le Dieu de l’Ancien Testament est tout aussi magnifique !

 

D’abord c’est le même, hein ! On n’a pas changé de Dieu entre les chapitres !

 

Mais allez voir ce que l’on dit du Dieu de l’Ancien Testament ! La première lecture de nos messes – en dehors du temps de Pâques – est généralement tirée de l’Ancien Testament.

 

Prenons celle d’aujourd’hui, l’extrait du livre de l’Exode, ça tombe bien : on a l’un des passages où Dieu parle de qui il est. Voilà une excellente occasion de compléter sa carte de visite. De découvrir l’identité de ce fameux Dieu de l’Ancien Testament prétendument épouvantable.

 

Vous avez entendu ce texte… Que dit Dieu à Moïse ce jour-là ? Je vous le relis : « Je suis le Seigneur, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité. »

 

« Lent à la colère », en hébreu, ça se dit « long de narines »… eh oui parce que, quand la colère nous monte au nez, si on a de longues narines ça sort moins vite, évidemment !

 

Nous avons un Dieu qui ressemble à Pascal Couchepin… un Dieu « Couchepinesque » comme dit mon ami François-Xavier Amherdt. Il est « long de narines »…

 

[Pour les personnes peu connaisseuses de la Suisse, Pascal Couchepin fut Conseiller Fédéral de 1998 à 2009, temps pendant lequel ce Valaisan fut deux fois président, en 2003 et 2008. Il possède en effet un nez que Cyrano n’aurait pas renié…]

 

Excusez-moi mais on est encore une fois assez loin de ce que disent les gens du Dieu de l’Ancien Testament…

 

Plein d’amour, lent à la colère, miséricordieux, tendre, un Dieu de vérité…

 

Il y avait le psaume, encore, tiré lui aussi de l’Ancien Testament. Et le psaume nous invitait, nous l’avons chanté ensemble, à bénir ce Dieu-là, à dire du bien de lui, ce Dieu qui siège dans les hauteurs.

 

Toute la Bible, chers Amis, parle de la tendresse de Dieu, d’un Dieu d’Amour, de justice, de Paix, de vérité, de miséricorde, d’un Dieu qui veut nous sauver. Qui VEUT nous sauver… C’est pas un Dieu-Superman, il a besoin de nous aussi. Mais il veut nous sauver, il ne veut pas nous juger.

 

‘Suffit de lire la Bible, évidemment. C’est peut-être là qu’était le problème jadis. On ne la lisait qu’en latin, dans une version extrêmement discutable – celle de St Jérôme qui a quand même pris quelques libertés avec le texte d’origine – et en plus dans une version qu’on traduisait très mal quand on avait le français en regard dans la page d’à côté. Evidemment ça n’aide pas à bien comprendre !

 

Alors lisons la Bible, Chers Amis, avec des gens qui la connaissent. Ne supprimons rien, profitons de ces textes que nous entendons chaque dimanche, de leur sagesse, de ce qu’ils disent de merveilleux au sujet de notre Dieu…

 

Convertissons nos cœurs en cette fête de notre Dieu-Trinité, convertissons nos esprits pour qu’ils arrêtent définitivement de croire au Dieu des terroristes, au Dieu qui fait peur, et que pour une fois nous puissions redire au monde que Dieu est Amour.

 

…C’est pas compliqué, trois mots : « Dieu est Amour » !

 

Qu’il est Paix, tendresse, miséricorde, joie, et qu’il veut nous sauver.

 

Je ne sais pour vous, mais pour moi c’est à ce Dieu-là – et uniquement à celui-là – que je crois.

 

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La Sage, samedi 10 juin 2017, 10.00

Evolène, dimanche 11 juin 2017, 9.00 (version enregistrée)

Hérémence, dimanche 11 juin 2017, 10.30

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  1. Georges QUELLET

    Merci, cher Vincent, pour ta magnifique homélie « couchepinesque », rétablisant la connaissance, parfois oubliée, d’une BIBLE si riche d’enseignements précieux.
    Georges et Pepita QUELLET.

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