Paul et le proverbe chinois

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Photo DR : blog.chinoisfacile.fr

Homélie pour le 12e dimanche TO, année B

Job 38,1-8.11 / Psaume 106 / 2Corinthiens 5,14-17 / Marc 4,35-41

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Chers Amis,

Je vous emmène au bistrot quelques instants vous voulez bien ? Je vous laisse le choix de l’établissement, la région n’en manque pas, Dieu merci !

Vous êtes à une table avec trois amis. Et ça cause…

Le premier dit que c’est Dieu qui maîtrise tout, qu’il ne faut pas vouloir prendre sa place. Le second va dans le même sens en appuyant un petit peu… et puis le troisième se demande où est Dieu quand ça va mal dans nos vies.

Et le quatrième sort un proverbe chinois.

Un proverbe chinois ! Un truc qui n’a à priori rien à voir, mais alors rien du tout, avec le reste de la discussion.

Genre, vous savez, il garde un instant de silence quand on lui demande son avis et puis il lève les yeux au ciel, et il dit « Le courage de la goutte d’eau, c’est qu’elle ose tomber dans le désert. »

Rien à voir !

On a envie de vérifier combien de verres il a bu, ou alors de lui dire : « Ecoute mon ami, tu es gentil, nous on parlait de Dieu, alors la goutte d’eau et le désert c’est bien sympa mais enfin… aucun rapport avec le schmilblick. »

C’est exactement ce que font certains prêtres avec la deuxième lecture de nos messes du dimanche. On ne la lit pas, on la laisse de côté, parce qu’on ne voit pas trop ce que cette lettre de Paul – parce que c’est souvent Paul – a à voir avec le reste. Hors sujet… trop difficile… on la lit pas.

D’ailleurs les lecteurs – Bernadette encore ce soir – me posent souvent la question : « On prend quelles lectures ? »

Et je leur réponds chaque fois la même chose : «Toutes, bien sûr !»

A la table du bistrot, il y a quatre amis. Et celui qui dit un proverbe chinois, on va pas le virer du bistrot pour autant, que je sache ! il est à table avec nous ! Et c’est important, ce proverbe qu’il a dit.

Si Vatican II nous a proposé d’avoir chaque dimanche une première lecture, un psaume qui lui répond, un extrait d’une lettre (souvent de Paul) et un Evangile, quatre textes, c’est pas pour en éliminer un sous prétexte qu’on ne le comprend pas ou qu’on estime qu’il est trop compliqué pour vous !

Parce qu’en fait, au bistrot, celui qui dit le proverbe chinois n’a pas trop bu du tout. Au contraire. C’est le sage de l’équipe. Il a écouté la conversation, sans trop parler, et tout à coup il dit quelque chose. Qui a l’air de n’avoir rien à voir avec le reste. Mais, lui, simplement, il a un regard un peu plus extérieur, il n’a pas le nez collé sur le sujet. Et ce qu’il dit prend tout ce sens, si on y réfléchit.

C’est pareil avec nos lectures de ce jour. Job parle de la mer, le psaume parle de vagues et de tempêtes, l’Evangile parle des disciples en barque au milieu de la tempête… On cerne à peu près le sujet, hein !

Et là au milieu, il y a Paul, qui sort un truc à lui : « Le Christ est mort pour nous tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes. »

On a envie de dire à Paul : « Tu es bien gentil, mais c’est quoi le rapport avec le reste ? T’es pas au jeu, avec ton histoire de mort et de résurrection, nous on parle de tempête, là ! ça n’a rien à voir ! c’est un proverbe chinois, ton truc ! »

Eh oui, mais c’est Paul qui va nous donner la clé de lecture des trois autres textes, justement. Vaudrait mieux n’avoir pas supprimé la deuxième lettre aux Corinthiens qu’on a entendue en deuxième lecture, parce qu’autrement on se retrouverait avec trois textes qui parlent de tempête, trois portes fermées, sans une seule clé pour les ouvrir, ce serait dommage…

Quelle est cette clé ? Job parle de la mer, en disant que Dieu en a fixé les limites, vous l’avez entendu. La mer fait partie de notre monde humain – bon pas tellement de notre environnement valaisan, c’est vrai –  mais elle fait partie de notre planète, la mer est terrestre si j’ose dire. Et c’est Dieu qui le dit dans cette célèbre phrase qu’on a entendue à la fin de la première lecture : « Tu es venue jusqu’ici, tu n’iras pas plus loin. » Dieu a fixé les limites de ce qui est terrestre.

Un peu comme on le dirait à un moustique qu’on aperçoit sur notre bras, un soir d’été, vous savez : « Tu es venu jusqu’ici, PAF, tu n’iras pas plus loin. »

Le psaume, lui, va un petit peu plus loin en disant que Dieu est capable aussi de calmer la tempête, pas seulement de lui mettre des limites. Et que les hommes lui rendent grâce pour cela.

L’Evangile répond parfaitement à tout ça puisque nous avons les disciples, au coeur d’une tempête, persuadés qu’ils ne pourront pas aller plus loin, qu’ils sont venus jusqu’ici et qu’ils ne pourront pas aller plus loin, qu’ils sont cuits, comme le moustique. Et on a Jésus qui parle à la tempête et qui la calme. Il permet à tout le monde de traverser – retenez bien ce terme – de traverser sans problème.

Et Paul alors ? Que vient-il faire avec son Christ mort pour nous afin que nous ayons une autre vie ?

Mais cette tempête, chers Amis, dont les autres lectures parlent, elle est peut-être symbolique… Cette mer que les autres créatures ne peuvent pas franchir, et dont Dieu fixe effectivement la limite, mais qu’il nous est possible à nous – les être humains – de traverser avec Jésus, c’est la mort chers Amis !

Un moustique n’ira jamais plus loin que cette tempête-là, il n’ira jamais plus loin que le jour de sa mort. Et la plupart d’entre nous avons peur à l’approche de cette tempête qu’est le jour de notre mort. On est persuadés qu’on va y rester, comme les disciples dans la barque ce jour-là. Et on dit à Dieu : « ça te fait rien ? »

Mais avec Jésus dans la barque, nous savons que nous pouvons traverser. Parce qu’il a donné sa vie pour nous – vous entendez Paul, c’est là que le texte de Paul prend tout son sens – parce que Jésus a donné sa vie pour nous, alors ça change tout dans notre vie à nous. Notre vie n’est plus centrée sur elle-même, limitée par la mort… elle débouche sur la vie éternelle.

Et c’est valable pour toutes les tempêtes de nos vies, chers Amis.

Alors ne soyons pas comme les disciples, n’ayons pas peur : nous sommes embarqués avec Jésus sur les vagues de nos vies, dans les tempêtes de nos morts. Mais lui est capable de nous faire traverser si nous lui offrons notre Foi.

Amen.

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Euseigne, samedi 20 juin 2015, 18.00

La Sage, samedi 20 juin 2015, 19.30 (version enregistrée)

Evolène, dimanche 21 juin 2015, 9.00

Hérémence, dimanche 21 juin 2015, 10.30

 

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  1. Antille Sylvie

    Merci Vincent ! Mais tous les prêtres ne prennent pas le temps de nous expliquer le fil rouge entre les 4 lectures, donc il est vrai que nous avons envie de sauter une lecture car justement il faut que quelqu’un nous conduise à ce fil rouge, afin de comprendre la logique. Merci et bon dimanche et bonnes vacances si tu y es.

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