Pauvre St Thomas !

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Photo DR : L’incrédulité de St Thomas, par le Caravage

Homélie pour le 2e dimanche de Pâques B

Actes 4,32-35 / Psaume 117 / 1 Jean 5,1-6   / Jean 20,19-31

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais pour ma part… souvent, souvent, j’ai prononcé cette phrase : « Oh moi, vous savez, je suis comme Saint Thomas ! J’ai besoin de toucher pour croire ! »

…Je vois à certains sourires même derrière vos masques que je ne suis peut-être pas le seul…

Et, en réalité, on a l’esprit complètement faussé, très souvent, par rapport à cet épisode que notre curé Rolf vient de nous proclamer à nouveau.

On a l’esprit faussé notamment par des tableaux célèbres, des représentations de cet épisode. Comment ne pas penser au tableau du Caravage, par exemple, pour celles et ceux qui le connaissent ? Où l’on voit Thomas toucher, mettre son doigt, comme ça, dans le côté du Christ, dans les plaies du Christ… On voit même le doigt s’enfoncer dans la chair, le réalisme est saisissant …mais est-ce bien ce qui s’est passé ?

Avez-vous bien écouté l’Evangile, chers Amis ? Mieux écouté que le Caravage, sauf le respect que nous lui devons ?

A AUCUN MOMENT il n’a été dit que Thomas ait touché le Christ ! A AUCUN MOMENT ! Pauvre Thomas ! On a rabaissé sa Foi bien plus bas qu’elle ne l’était réellement !

Je vous recite le passage, parce que je vois dans vos yeux que vous êtes en train d’essayer de vous souvenir de ce que vous avez entendu. Je vous recite le passage de cette scène que vous connaissez pourtant par cœur, mais comme moi, jadis, vous êtes peut-être encore persuadés que Thomas a touché pour croire… Eh bien non.

Dans un premier temps, en l’absence de Jésus, Thomas a effectivement dit ceci : « Si je ne vois pas, dans ses mains, la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas. »

Il l’a dit.

Mais entre dire et faire, il y a une nuance.

Toucher, c’est bien ce qu’il a l’INTENTION de faire, quelques jours avant. Mais avoir l’intention de faire quelque chose, ce n’est pas encore le faire.

A chaque 1er janvier, vous êtes, comme moi, remplis de bonnes intentions, et de bonnes résolutions, n’est-ce pas ? …Et maintenant, un peu plus de 3 mois après, elles en sont où, dites-moi ? Ah si vous les avez tenues, bravo ! Mais ce n’est pas toujours le cas.

Entre avoir l’intention de faire quelque chose, et le faire effectivement, il y a parfois un gouffre !

Dans notre Evangile, vient ensuite le jour où Jésus est à nouveau là, mais en présence de Thomas cette fois-ci. Et Jésus répète à Thomas, mot pour mot, ce qu’il avait dit la semaine d’avant : « Avance ton doigt ici, dit Jésus, avance ta main, mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »

Et que se passe-t-il ensuite, alors ? Est-ce que Thomas avance sa main et touche Jésus ? Le texte ne le dit pas.

La seule chose qu’on nous dit, juste derrière, c’est : « Thomas s’écria ’Mon Seigneur et mon Dieu !’ » Voilà seulement ce que nous dit le texte.

…où avez-vous lu qu’il a touché ?? Nulle part ! Jésus lui propose de le faire… « Avance ta main, mets ton doigt… » Et il lui dit : « Cesse d’être incrédule ! » Mais rien ne dit que Thomas a touché. Absolument rien.

Si Thomas avait dû toucher, on pourrait le taxer d’incrédulité. Mais Thomas a cessé brusquement d’être incrédule, avant de toucher Jésus, simplement en le voyant.

Il n’a justement PAS touché.

Alors vous me direz, il l’a peut-être fait mais ce n’est pas marqué. D’ailleurs c’était la dernière phrase de l’Evangile : « Il y a beaucoup d’autres choses mais qui ne sont pas marquées dans ce livre. »

Vous auriez raison s’il n’y avait pas eu la phrase suivante dans le texte…

Quelle était la phrase suivante ? Vous l’avez entendue…

Jésus, dans la phrase qui suit, dit à Thomas : « Parce que tu m’as VU, tu crois. » Jésus ne dit pas « parce que tu m’as touché, tu crois », « PARCE QUE TU AS VU TU CROIS »…

Thomas a fait déjà un pas de géant dans sa foi. Il voulait toucher et il lui a suffi de voir.

Et Jésus l’invite désormais à faire un pas de plus : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »

Qui sont ces gens ? Ceux qui croient sans avoir vu ?  Mais c’est vous ! C’est moi ! C’est nous tous !

Et Jésus parle de nous, dans ce texte, évidemment ! L’Evangile n’est pas un vieux texte d’il y a deux mille ans ! L’Evangile vient toujours nous parler de l’aujourd’hui de notre vie ! Et ce que disait l’Evangile de ce matin, il parle de nous : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu… », c’est nous …

Nous croyons sans avoir vu, contrairement à Thomas ! Nous croyons et nous continuons, 2000 ans après, sur les témoignages de ceux qui ont vu, nous continuons à croire. Notamment sur le témoignage de Thomas.

Nous continuons de croire en cet événement qui change tout, la résurrection du Christ.

Un événement qui fait que notre mort n’est plus qu’un passage vers la vie – « non, je ne mourrai pas, je vivrai ! » disait le psaume que je vous ai chanté. Mais c’est de nous qu’il parlait, ce psaume : « Non, nous ne mourrons pas, nous vivrons ! » C’est la Bonne Nouvelle de Pâques.

Un événement, la Résurrection, qui fait que notre vie entière est appelée à changer à la suite de celui qui a donné sa vie pour nous.

Une vie qui doit être faite désormais de charité, de partage. C’est la lecture des Actes des Apôtres, notre première lecture, qui le disait très bien. C’est ce que nous essayons de faire grâce à vous en partageant avec celles et ceux qui n’ont rien ou qui ont moins.

Une vie faite d’amour des autres, notre deuxième lecture, la lettre de Jean, le disait très bien : il s’agit de nous aimer.

Une vie habitée par l’Esprit Saint désormais. L’Esprit qui rend témoignage au plus profond de nous.

Une vie qui est habitée par la Foi au moins aussi puissante que celle de Saint Thomas puisque nous, nous n’avons pas eu besoin de voir pour croire !

Ça nous place au moins aussi haut que Thomas ! Peut-être même davantage… mais non, gardons notre humilité : Saint Thomas – ne serait-ce que parce qu’il est saint – est bien plus haut que nous !

Alors chers Amis, si certains d’entre vous se lamentent en se croyant encore semblables à Saint Thomas – comme je me croyais moi-même jadis – rassurez-vous, ce n’est pas une tare !

St Thomas vaut mieux, vaut beaucoup mieux, que ce que l’on a cru de lui pendant trop longtemps.

Il n’a pas eu besoin de toucher pour croire, justement pas, la seule vision lui a suffi !

Si vous êtes comme Saint Thomas, grand bien vous fasse ! Mais vous, en plus, vous croyez sans avoir vu… Magnifique !

Nous sommes les bienheureux dont parle Jésus, nous croyons sans avoir vu, sans quoi nous ne serions pas là ce matin.

Reste maintenant à en devenir les témoins, notamment en ce temps de Pâques, à le redire autour de nous, à proclamer ce Ressuscité qui fait que la mort n’a plus aucun pouvoir sur nous.

Et ça, c’est aussi une sacrée Bonne Nouvelle de Pâques !

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Aigle, dimanche 11 avril 2021, 10.00 (version enregistrée)

et jadis dans une version un peu différente :

Champex-Lac, samedi 7 avril 2018, 17.00

Vex, samedi 11 avril 2015, 19.00

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